WWIII : Poésies de SAPPHO, pour la Paix et la Sécurité.
ODE A APHRODITE POUR LA PAIX ET LA SECURITE
TÊTE ORIGINALE DE L'APHRODITE DE PRAXITELE
Dans la littérature grecque, une ode, du grec ὠδή (chant), est un poème lyrique en strophes, accompagné de musique. Par extension, une ode est un poème célébrant un personnage ou un événement : un vainqueur des Jeux olympiques, par exemple.
Une ode peut aussi être triste, relatant un amour perdu ou un simple désespoir face à un monde en détresse. C’est un genre élevé, l’équivalent poétique de l’épopée.
ODE A APHRODITE POUR LA PAIX ET LA SECURITE, quand elle officiait au culte d'Aphrodite entourée de vierges, à Erésos, sur l'île de Mytilène.
Déesse au trône éclatant, Immortelle Aphrodite,_
fille de Zeus, ourdisseuse d'intrigues, _
Je t'en supplie, d'angoisses et d'amertumes, _
Vénérée, n'accable plus mon coeur.
Mais viens ici, si jamais dans un autre temps, _
écoutant mes appels, tu les entendis de loin, _
et, délaissant le palais de ton père, _
tu vins, après avoir
attelé ton char d'or ! De beaux passereaux agiles _
te conduiront aux noirs alentours de la terre, _
en faisant tournoyer leurs ailes précipitées, _
du haut du ciel au milieu du néant.
Bien vite ils arriveront. Et toi, Bienheureuse, _
ayant souri de ton visage immortel, _
tu m'informeras de ce qu'alors je souffrais, _
de la raison pour laquelle alors je t'appelais, _
et de ce que je voulait obtenir entre tout _
mon coeur en délire. "Quelle est celle encore _
qu'il faut que je fléchisse, et que je ramène _
à ton amour? Qui donc Ô Sappho, _
te traite injustement ? "
"Car si elle te fuit, bientôt elle te recherchera; _
si elle n'accepte pas tes présents, elle-même t'en offrira;
si elle ne t'aime point, bien vite elle t'aimera, _
et cela, malgré elle."
Accours encore en ce moment vers moi; _
de ma poignante anxiété, délivre-moi; _
accomplis tout ce que mon coeur désire voir accompli, _
et sois toi-même mon alliée!
(εἰς Ἀφροδίτην)
Ποικιλόθρον᾽ ἀθανάτ᾽ Ἀφρόδιτα,
παῖ Δίος δολόπλοκε, λίσσομαί σε,
μή μ᾽ ἄσαισι μηδ᾽ ὀνίαισι δάμνα,
πότνια θῦμον·
5
ἀλλὰ τύιδ᾽ ἔλθ᾽, αἴ ποτα κἀτέρωτα
τὰς ἔμας αὔδας ἀίοισα πήλοι
ἔκλυες, πάτρος δὲ δόμον λίποισα
χρύσιον ἦλθες
ἄρμ᾽ ὐπασδεύξαισα· κάλοι δέ σ᾽ ἆγον
10
ὤκεες στροῦθοι περὶ γᾶς μελαίνας
πύκνα δίννεντες πτέρ᾽ ἀπ᾽ ὠράνω αἴθε-
ρος διὰ μέσσω.
αἶψα δ᾽ ἐξίκοντο, σύ δ᾽, ὦ μάκαιρα,
μειδιαίσαισ᾽ ἀθανάτωι προσώπωι
15
ἤρε᾽, ὄττι δηὖτε πέπονθα κὤττι
δηὖτε κάλημμι
κὤττι μοι μάλιστα θέλω γένεσθαι
μαινόλαι θύμωι. «τίνα δηὖτε Πείθω
μαῖσ᾽ ἄγην ἐς σὰν φιλότατα, τίς σ᾽, ὦ
20
Ψάπφ᾽, ἀδίκησι;
καὶ γὰρ αἰ φεύγει, ταχέως διώξει, αἰ δὲ δῶρα μὴ δέκετ᾽,
ἀλλὰ δώσει, αἰ δὲ μὴ φίλει, ταχέως φιλήσει
κωὐκ ἐθέλοισα.»
25
ἔλθε μοι καὶ νῦν, χαλέπαν δὲ λῦσον
ἐκ μερίμναν, ὄσσα δέ μοι τέλεσσαι
θῦμος ἰμέρρει, τέλεσον, σὺ δ᾽ αὔτα
σύμμαχος ἔσσο.
OEUVRES DE SAPPHO
TRADUITES PAR M. ERNEST FALCONNET
FRAGMENTS DE SAPPHO
HYMNE A VÉNUS
Ποικιλόθρον᾽ ὰθάνατ᾽ ᾽Αφροδιτα,
παῖ Δίος, δολόπλοκε, λίσσομαί σε
μή μ᾽ ἄσαισι μήτ᾽ ὀνίαισι δάμνα,
πότνια, θῦμον.
ἀλλά τυίδ᾽ ἔλθ᾽, αἴποτα κἀτέρωτα
τᾶς ἔμας αύδως αἴοισα πήλυι
ἔκλυες πάτρος δὲ δόμον λίποισα
χρύσιον ἦλθες
ἄρμ᾽ ὐποζεύξαια, κάλοι δέ σ᾽ ἆγον
ὤκεες στροῦθοι περὶ γᾶς μελαίνας
πύκνα δινεῦντες πτέῤ ἀπ᾽ ὠράνω
αἴθερος διὰ μέσσω.
αῖψα δ᾽ ἐχίκοντο, σὺ δ᾽, ὦ μάσαιρα
μειδιάσαις᾽ ἀθάνατῳ προσώπῳ,
ἤρἐ ὄττι δηὖτε πέπονθα κὤττι
δἦγτε κάλημι
κὤττι μοι μάλιστα θέλω γένεσθαι
μαινόλᾳ θύμῳ, τίνα δηὖτε πείθω
μαῖς ἄγην ἐς σὰν φιλότατα τίς τ, ὦ
Πσάπφ᾽, ἀδίκηει;
καὶ γάρ αἰ φεύγει, ταχέωσ διώξει,
αἰ δὲ δῶρα μὴ δέκετ ἀλλά δώσει,
αἰ δὲ μὴ φίλει ταχέως φιλήσει,
κωὐκ ἐθέλοισα.
ἔλθε μοι καὶ νῦν, χαλεπᾶν δὲ λῦσον
ἐκ μερίμναν ὄσσα δέ μοι τέλεσσαι
θῦμος ἰμμέρρει τέλεσον, σὐ δ᾽ αὔτα
σύμμαχοσ ἔσσο.
Immortelle Vénus, fille de Jupiter, toi qui sièges sur un trône brillant et qui sais habilement disposer les ruses de l'amour, je t'en conjure, n'accable point mon âme sous le poids des chagrins et de la douleur. Mais plutôt viens à ma prière comme tu vins autrefois, quittant le palais de ton père et descendant sur ton char doré. Tes charmants passereaux t'amenaient de l'Olympe à travers les airs qu'ils agitaient de leurs ailes rapides. Dès qu'ils furent arrivés, ô déesse ! tu me souris de ta bouche divine ; tu me demandas pourquoi je t'appelais ; quels tourments ressentait mon cœur, en quels nouveaux désirs il s'égarait ; qui je voulais enchaîner dans les liens d'un nouvel amour : "Qui oserait te faire injure, ô Sappho ! S'il te fuit aujourd'hui, bientôt il te recherchera ; s'il refuse aujourd'hui tes dons, bientôt il t'en offrira lui-même s'il ne t'aime pas aujourd'hui, il t'aimera bientôt lors même que tu ne le voudrais plus."
O viens, viens donc aujourd'hui, déesse, me délivrer de mes cruels tourments ! Rends-toi aux désirs de mon cœur ! Ne me refuse pas ton secours tout-puissant !
À UNE FEMME AIMÉE
φάινεταί μοι κῆνος ἴσοσ τηέοισιν
ἔμμεν ὤνερ ὄστις ἐναντίος τοι
ἰζάνει καὶ πλασίον ἀδυ
φωνεύσασ ὐπακούει
καὶ γαλαίσας ἰμμερόεν τὸ δὴ ᾽μάν
καρδίαν ἐν στήθεσιν ἐπτόασεν,
ὠσ γὰρ εὔιδον βροχέως σε, φώνας
οὐδὲν ἔτ᾽ ἔικει,
ἀλλὰ κάμ μὲν γλῳσσα έαγε, λέπτον
δ᾽ αὔτικα χρῷ πῦρ ὐπαδεδρόμακεν,
ὀππάτεσσι δ᾽ οὐδὲν ορημ᾽,
ἐπιρρόμβεισι δ᾽ ἄκουαι.
ἀ δέ μ᾽ ί᾽δρως κακχέεται, τρόμος δὲ
παῖσαν ἄγρει χλωροτέρα δὲ ποίας
ἔμμι, τεθνάκην δ᾽ ὀλιγω ᾽πιδεύην
φαίνομαι [ἄλλα].
πᾶν τόλματον [......]
Il me paraît égal aux dieux celui qui, assis près de toi, doucement, écoute tes ravissantes paroles et te voit lui sourire ; voilà ce qui me bouleverse jusqu'au fond de l'âme.
Sitôt que je te vois, la voix manque à mes lèvres, ma langue est enchaînée, une flamme subtile court dans toutes mes veines, les oreilles me tintent, une sueur froide m'inonde, tout mon corps frissonne, je deviens plus pâle que l'herbe flétrie, je demeure sans haleine, il semble que je suis près d'expirer.
Mais il faut tout oser puisque dans la nécessité...
ÉPITAPHE DU PÊCHEUR PÉLAGON
Ménisque, père du pêcheur Pélagon, a fait placer sur le tombeau de son fils une nasse et une rame, monuments de sa vie dure et pénible.
ÉPITAPHE DE LA JEUNE TIMAS
Τιμάδος ἄδε κόνισ, τὰν δὴ ρπὸ γάμοιο θανοῦσαν
δέξατο φερσεφόνας κύανεοσ θάλαμο,
ας καὶ ἐποφθιμένας πᾶσαι νεοθᾶγι σιδάρῳ
ἄλικες ιμμερτὰν κρᾶτος ἔθεντο κόμαν.
Les cendres de la charmante Timas reposent dans ce tombeau. Les Parques cruelles tranchèrent le fil de ses beaux jours avant que l'Hyménée eût allumé pour elle ses flambeaux. Toutes ses compagnes ont coupé courageusement sur sa tombe leur belle chevelure.
FRAGMENTS
I
SUR LA ROSE
Si Jupiter voulait donner une reine aux fleurs, la rose serait la reine de toutes les fleurs. Elle est l'ornement de la terre, la plus belle des plantes, l'œil des fleurs, l'émail des prairies, une beauté toujours suave et éclatante ; elle exhale l'amour, attire et fixe Vénus : toutes ses feuilles sont charmantes ; son bouton vermeil s'entrouvre avec une grâce infinie et sourit délicieusement aux zéphyrs amoureux.
II
Κατθάνοισα δὲ κείσεαι πότα, κωὐ μναμοσύνα σέθεν
ἔσσετ᾽ οὔτε τότ᾽ οὔτ᾽ ὕστερον. οὐ γὰρ πεδέχεις βρόδων
τῶν ἐκ Πιερίας ἀλλ᾽ ἀφάνης κἠν᾽ ᾽Αῖδα δόμοις
φοιτάσεις πεδ᾽ ἀμαύρων νέκυων ἐκπεποταμένα.
Lorsque vous serez dans le tombeau, votre nom ne vous suivra point, il ne parviendra jamais à la postérité. Vous n'avez point cueilli des roses sur le mont Piérius : vous descendrez donc obscure, ignorée dans le sombre palais de Pluton ; on vous oubliera entièrement quand vous serez allée rejoindre les ombres.
III
... Ἕλθε, Κύπρι,
Χρυσίασιν ἐν κυλίκεσσιν ἄβραις
συμμεμιγμένον θαλίαισι νέκταρ
οἰνοχόεισα.
Viens dans nos repas délicieux, mère de l'Amour, viens remplir d'un nectar agréable nos coupes d'or ; que ta présence fasse naître la joie au milieu de tes convives et des miens. L'amour vainqueur de tous les obstacles me trouble et m'agite. C'est un oiseau doux et cruel ; on ne peut lui résister. Athis, je vous suis maintenant odieuse, tandis que toutes vos pensées sont pour la belle Andromède.
IV
Δέδυκε μεν ἀ σελάννα
καὶ Πληΐαδες, μέσαι δὲ
νύκτες πάρα δ᾽ ἔρχετ᾽ ὤρα,
ἔγω δὲ μόνα κατεύδω.
La lune et les Pléiades sont déjà couchées : la nuit a fourni la moitié de sa carrière, et moi, malheureuse, je suis seule dans mon lit, accablée sous le chagrin.
V
Γλύκεια μᾶτερ, οὔ τοι δύναμαι κρέκην τὸν ἴστον,
πόθῳ δάμεισα παῖδος βραδίναν δἰ Ἀφρόδιταν.
O ma tendre mère, je ne puis, hélas ! manier la navette ni l'aiguille : la redoutable Vénus m'a soumise à son joug impérieux, et mon violent amour pour ce jeune homme m'occupe tout entière.
FRAGMENTS DIVERS
Τίς δ᾽ ἀγροιῶτίς τοι θέλγει νόον,
οὐκ ἐπισταμένα τὰ βράκἐ ἔλκην
ἐπί τῶν σφύρων;
Comment cette femme grossière et sans art peut-elle charmer ton esprit et enchaîner ton cœur ? Elle ne sait pas même laisser flotter avec grâce les plis de sa robe.
Le deuil et les larmes ne doivent point régner dans la maison d'un poète : c'est une faiblesse indigne d'un fils d'Apollon.
Ὀ μὲν γὰρ κάλος, ὄσσον ἴδην, πέλεται [ἄγαθος]
ὀ δὲ κἄγαθος αὔτικα καὶ κάλος ἔσσεται.
L'homme qui n'est que beau, l'est seulement pendant qu'on le regarde, mais l'homme sage et bon est toujours beau.
Pour moi, j'aime une vie molle et voluptueuse ; mais cet amour pour les plaisirs présents ne m'empêche pas de faire des actions brillantes et honnêtes.
Ἄλλά τις οὐκ ἔμμι παλιγκότων
ὄργαν, ἀλλ᾽ ἀβάκην τὰν φρέν᾽ ἔχω
Je ne suis point d'un caractère bouillant et emporté, mon esprit au contraire est tranquille et calme.
Les richesses sans la vertu ne sont jamais à l'abri du reproche ; mais renier la vertu et les richesses, voilà le comble du bonheur.
L'or est le fils de Jupiter ; ni la rouille ni les vers ne rongent ce métal, qui agite si merveilleusement l'intelligence des mortels.
Ὄλβιε γάμβρε, σοὶ μὲν δὴ γάμοσ, ὠς ἄραο
ἐκτετέλεστ᾽ ἔχεις δὲ πάρθενον, ἄν ἄραο
Heureux époux : tes noces sont terminées au gré de tes désirs ; tu possèdes la jeune beauté que tu souhaitais.
Architectes, donnez plus d'élévation à ces portes, car l'époux qui s'avance est semblable au dieu Mars : il est beaucoup plus haut qu'un homme d'une grande taille.
Ils tenaient tous ensemble des vases, offraient des libations et faisaient des vœux pour le bonheur du nouvel époux.
Jamais une fille ne fut égale en beauté à celle-ci, ô mon gendre !
έσπερε, πάντα φέρων, ὄσα φαίνολις ἐσκέδασ᾽ αγως,
φέρεις οἴν, φέρεις αἶγα, φέρεις ἄπυ ματέρι παῖδα.
Hespérus, tu apportes avec toi tous les bonheurs : tu nous annonces l'heure de vider les coupes ; tu ramènes les troupeaux à la bergerie et la jeune bergère auprès de sa mère. Hespérus, tu rassembles tous les êtres que l'Aurore avait dispersés par le retour de sa lumière.
A. Παρθενία, παρθενία, ποῖ με λίποισ᾽ ἀποίχῃ;
B. Οὐκέτι ἤξω πρὸς σέ, οὐκέτι ἤξω.
Virginité, virginité, où t'envoles-tu après m'avoir abandonnée ? ... Je ne reviendrai plus vers toi, je ne reviendrai plus.
Venez ici, Muses, abandonnez votre brillant séjour ! ... Venez maintenant, Grâces délicates, et vous Muses à la belle chevelure ; ... Venez chastes Grâces aux bras de rose, venez, filles de Jupiter ! ...
Luth divin, réponds à mes désirs, deviens harmonieux ! ... C'est toi-même, Calliope ...
Les dédains de la tendre et de la délicate Gyrine ont enfin déterminé mon cœur pour la belle Mnaîs... L'amour agite mon cœur comme le vent agita les feuilles des chênes sur les montagnes... Je volerais sur le sommet élevé de vos montagnes et je m'élancerais entre tes bras, toi pour qui je soupire... Tu m'enflammes... tu m'oublies entièrement ou tu en aimes un autre plus que moi... Mets des couronnes de roses sur tes beaux cheveux ; cueille avec tes doigts délicats les branches de l'aneth... La jeune beauté qui cueille des fleurs en paraît encore plus charmante et plus belle... Les victimes ornées de fleurs sont agréables aux dieux, ils dédaignent toutes celles qui ne sont point parées de guirlandes... Je vais chanter maintenant des airs mélodieux qui feront les délices de mes amantes... Le rossignol annonce le printemps par ses doux sons... Plusieurs guirlandes et plusieurs couronnes de fleurs environnaient son cou... L'Amour est fils de la terre et du ciel... La Persuasion est fille de Vénus... Réjouissez-vous, jeune épouse ; réjouissez-vous, époux respectable !... Ami, tenez-vous vis-à-vis de moi ; que vos yeux brillent de tout leur feu et de toute leur grâce... L'eau fraîche d'un ruisseau murmure doucement dans ces vergers sous les branches des pommiers... J'ai dormi délicieusement pendant mon songe dans les bras de la charmante Cythérée...
Le bruit des feuilles agitées a dissipé mon sommeil...
Πόλυ πάκιδος ἀδυμελεστέρα, χρύσω χρυσοτέρα.
Ses chants étaient beaucoup plus doux que le son de la lyre, et elle était bien plus précieuse que l'or le plus pur...
Amour, ministre charmant de Vénus...
Ces colombes timides sentaient leur courage se refroidir ; elles laissaient tomber languissamment leurs ailes fatiguées...
Saluez de ma part la fille de Polyanacte...
Ἀρτίως μ᾽ ἀ χρυσοπέδιλλος Ἀύως
L'Aurore à la chaussure d'or paraît déjà à l'horizon...
Toutes les couleurs se confondaient sur son visage...
La lune dans son plein éclairait les cieux...
Ἀστερες μέν ἀμφὶ κάλαν σελάνναν
ἆιψ ἀπυκρύπτοισι φάεννον εἶδος,
ὄπποτα πλήθοισα μάλιστα λάμπης
ἀργυρια γᾶν.
Les étoiles cachent leurs feux brillants dans le voisinage de la lune, surtout lorsque parfaitement arrondi, ce bel astre éclaire la terre...
Le sommeil était étendu sur ses paupières...
Que les vents emportent ceux qui frappent les autres...
Ceux à qui je rends des services importants me font les plus profondes blessures...
Charmante Vénus, je vous ai envoyé des ornements de couleur de pourpre ; ils sont très précieux : c'est votre Sappho qui vous offre ces agréables présents...
Je ne vous estime pas autant que vous le voudriez...
Vos présents m'ont rendue respectable...
Ne vous occupez pas à des choses aussi minutieuses...
Oui c'est un mal de mourir, car si ce n'eût pas été un malheur, les dieux seraient morts eux-mêmes...
Dans la colère, rien ne convient mieux que le silence ; lorsque ses transports sont calmés, il faut encore enchaîner sa langue et ne point se livrer à des discours futiles et emportés...
Les parents de cette jeune beauté gardée avec tant de soin prétendaient qu'elle détestait plus que la mort les discours sur l'hymen...
Sappho est une poétesse grecque de l'Antiquité qui a vécu aux VIIe siècle et VIe siècle av. J.-C. à Mytilène, sur l'île de Lesbos. De nombreux fragments de ses poèmes nous sont parvenus.
L'égal des dieux
Il m'éblouit, il goûte le bonheur des dieux cet homme qui devant toi prend place et près de toi écoute, captivé, la douceur de ta voix.
Ah ! ce désir d'aimer qui passe dans ton rire. Et c'est bien pour cela qu'un spasme étreint mon cœur dans ma poitrine. Car si je te regarde, même un instant, je ne puis plus parler.
Mais d'abord ma langue est brisée, un feu subtil soudain a couru en frisson sous ma peau, mes yeux ne me laissent plus voir, un sifflement tournoie dans mes oreilles.
Une sueur glacée couvre mon corps, et je tremble, tout entière possédée, et je suis plus verte que l'herbe. Me voici presque morte, je crois.
Mais il faut tout risquer... puisque...
- (grc)
- Fragment 31, l'un des poèmes les plus connus de Sappho. La fin est perdue.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, p. 38-39
Autres fragments
Une troupe de cavaliers, disent-ils, ou de soldats à pied,
une escadre, rien n'est plus beau
sur la terre bleu et sombre. Mais, moi, je dis :
c'est celui-là ou celle que l'on aime d'amour.
- (grc)
- Fragment 16 (extrait).
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 16, p. 30-31, vers 1-4
Quand nous restons face à face et que je te regarde
dans cette lumière où tu apparais, pas même Hermione
n'est aussi belle, Hélène aux cheveux d'or c'est toi,
elle est ta ressemblance, il n'y a rien d'étrange à le dire ...
- (grc)
- Fragment 23 (extrait).
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 23, p. 36-37
Filles splendides, ma pensée envers vous
ne peut pas changer.
- (grc)
- Fragment 41.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 41, p. 40-41
Éros a ébranlé mon
âme comme le vent dans la montagne quand il s'abat sur les chênes.
- (grc)
- Fragment 47.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 47, p. 42-43
Beauté ne demeure que le temps d'un regard.
Mais vertu aussitôt sera beauté demain.
- (grc)
- Fragment 50.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 50, p. 100-101
Je ne sais vers quoi courir : doubles sont mes projets.
- (grc)
- Fragment 51.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 51, p. 100-101
Douce mère, ah ! je ne puis plus tisser ma trame.
Le désir d'un garçon m'a domptée, par le vouloir de la svelte Aphrodite.
- (grc)
- Fragment 102.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 102, p. 112-113
Puisses-tu dormir sur le sein de la douce amie qui te ressemble ! ...
- (grc)
- Fragment 126.
-
(grc) Odes et fragments, Sappho (trad. Yves Battistini), éd. Gallimard, coll. Poésie, 2005, 126, p. 66-67
Oui, quelqu'un plus tard se souviendra de nous.
Deux nouveaux poèmes de la poétesse antique complètement inédits viennent d’apparaître, grâce à un collectionneur anonyme. Le «poème des frères» et le «poème de Cypris» sont susceptibles de faire évoluer son image vers de nouvelles métamorphoses
La nouvelle est en train de faire le tour du monde. Deux nouveaux poèmes de Sappho ont été découverts! Pas complets certes, mais très bien conservés et complètement inédits. La scène est à Oxford. Un collectionneur anonyme soumet au professeur Dirk Obbink un papyrus, très bien conservé, de 20 centimètres sur 10, du début du IIIe siècle après J.-C.
La disposition en strophes, le dialecte, la forme métrique, tout renvoie à la poésie de Sappho. Mieux encore, deux noms propres lèvent le doute: ceux de Charaxos et de Larichos connus comme les frères de la poétesse. Dirk Obbink, c’est son privilège, peut donner des titres aux deux poèmes: le «poème des frères» et le «poème de Cypris», une prière à la divinité de l’amour, hélas plus fragmentaire.
«Plus excitant qu’un nouvel album de David Bowie», titrait, l’autre jour, The Telegraph. Bien plus que cela, même si les découvertes papyrologiques se sont multipliées depuis 2001, avec déjà pour Sappho, en 2004, la découverte de nouveaux vers du poème de Tithon.
On possède si peu de l’œuvre de Sappho. Des centaines de poèmes qui constituaient son œuvre à la bibliothèque d’Alexandrie, une seule ode nous est parvenue intégralement. Sappho est cette poétesse que l’on fantasme bien plus qu’on ne la connaît. Deux nouveaux poèmes, ce n’est pas seulement 29 lignes de grec en plus, c’est un débat relancé sur l’aventure de notre mémoire, une pièce nouvelle pour le procès de l’imaginaire occidental.
Car Sappho est cette exception qui révèle à quel point l’Occident a eu du mal à reconnaître qu’une femme pouvait être, au même titre qu’un homme, une grande poétesse.
Née dans l’île de Lesbos, il y a 2600 ans, d’une famille aristocratique, Sappho a été un personnage important, dérangeant. Dans les extraits conservés de sa poésie, elle évoque des jeunes femmes qui l’entouraient. Avait-elle avec ces compagnes des relations amoureuses, initiatiques ou non? Sans doute, mais tout le problème est ici de comprendre le vrai statut, à cette époque, des relations homoérotiques féminines. Sa poésie avait-elle une dimension politique, susceptible de justifier son exil en Sicile? Probable aussi. A-t-elle blâmé son frère dans sa poésie, comme le prétend Hérodote? Beaucoup en doutaient. Le nouveau papyrus donne la réponse: oui, Hérodote avait raison.
Entre histoire et légende, Sappho a excité l’imaginaire de l’Occident. Dans l’Athènes classique, les poètes comiques font d’elle une courtisane libertine; elle devient ensuite un Socrate au féminin; les médecins recourent à sa poésie pour leur diagnostic; à Rome, Horace l’imite pour s’approprier une sensibilité féminine, tandis qu’Ovide invente une lettre d’amour désespéré qu’elle aurait pu écrire à un amant. Au IIe siècle de notre ère, elle est traitée de débauchée par un Père de l’Eglise; à la Renaissance, les humanistes font croire que les chrétiens avaient brûlé ses œuvres à l’instigation du pape Grégoire VII. Au XVIIe, pour sauver Sappho, il faut nier son homosexualité, idem dans l’Allemagne nazie. Au XXe siècle, elle devient l’emblème des mouvements lesbiens qui oublient qu’en grec ancien, le lesbianisme désignait non pas l’homosexualité, mais la technique des femmes de Lesbos expertes en fellation.
Educatrice, dixième Muse, prostituée dévergondée, épouse malheureuse, émigrée, lesbienne? Au tout début de notre ère, c’est le géographe Strabon qui a donné la meilleure définition: «Sappho, une chose extraordinaire, unthaumaston!» Il faut dire le mot en grec, car il désigne un objet qui suscite un émerveillement divin, presque incroyable. Sappho, difficile à penser, est de l’ordre du merveilleux. Et la découverte du nouveau fragment est un thaumaston qui vient confirmer que tout n’était pas faux dans l’histoire incroyable de cette courtisane Rhodopis, dont Hérodote disait qu’elle avait ruiné le frère de Sappho qui s’en plaignait dans un poème.
Quelle est alors la nouvelle Sappho que l’on vient de découvrir? Car déjà le débat n’est plus que philologique. Officiellement, la découverte d’Obbink devait attendre sa publication dans le prochain numéro de la revueZeitschrift für Papyrologie und Epigraphik, mais le secret était impossible à garder et la copie de l’article «à paraître» a déjà fait le tour du Web. Il contient une première transcription du poème des frères et un premier commentaire. Les premières traductions circulent sur le Web, elles vont se multiplier. Faut-il donner au lecteur du Temps une première traduction française? C’est trop tôt. Et Sappho vit moins dans une traduction que dans tout ce que sa poésie suggère.
Ce qui m’intéresse ici, c’est la nouvelle Sappho que le XXIe siècle est déjà en train d’inventer. Dans ce poème, la poétesse s’adresse à un interlocuteur qui critique son frère Charaxos, parti en mer. Il faut plutôt prier les dieux de lui accorder le retour et de faire du plus jeune frère un homme. Déjà, dans un texte à peine publié dans le Times Literary Supplement , Obbink va plus loin et compare Sappho à une Pénélope attendant son frère aîné qui serait comme Ulysse, le plus jeune comme Télémaque. C’est la nouvelle métamorphose de Sappho, désormais comparée à Pénélope, dans l’histoire admirable d’un imaginaire nourri par la philologie.
* David Bouvier est professeur
de grec ancien à l’Université
de Lausanne.
Deux nouveaux poèmes de la poétesse antique complètement inédits
Pourtant, vous continuez à gazouiller quand Charaxos
devrait arriver, son bateau plein. Par ce genre d'attente je reconnais
Zeus et ses autres dieux; et vous devriez me croire;
assez!, commander moi, d'être un Messager
priant intensément au trône d'Héra
sinon qui pourrait le conduire, lui et son bateau pour arriver
enfin ici, mon Charaxos,
me retrouver en toute sécurité; Renvoyons toutes les
autres préoccupations pour les esprits inférieurs;
après tout, après les ouragans les cieux clairs
suivre rapidement;
et ceux dont le destin de souverain Olympien
souhaitent transformer des angoisses en Paix -
Ils sont alors plus énis, ils s'en vont se réjouissant
de leur bonne fortune.
Quant à moi, si Larichos atteint l'âge adulte,
[s' il pouvait arriver à être riche et oisif,]
il me donnerait, à mon cœur oppressé, un tel
soulagement.
Sappho (Σαπφώ, elle-même s’appelle Ψάπφω, Ψάπφα)
Larichos semble avoir occupé dans sa jeunesse une place en vue parmi les Mytiléniens, car Sappho vante la grâce avec laquelle il servait le vin dans le prytanée, un office réservé aux jeunes gens d’origine noble et de belle prestance. Il semble avoir été très cher à Sappho (T.5a).
Quant à Charaxos, il s’attira les foudres de sa sœur pour sa vie dissipée. Il entreprit un voyage en Égypte avec un navire chargé de vin ; arrivé à Naucratis et ayant liquidé ses affaires, il tomba follement amoureux de la courtisane Rhodopis, dont il acheta la liberté pour une somme très importante. À son retour à Mytilène, il fut violemment tancé par Sappho (Hdt. 2.135 ;Strab. xvii. 808 ; Ath. xiii. 596b). Selon la Souda (s.vv. Αἴσωπος, Ἰάδμων), Charaxos épousa par la suite Rhodopis, dont il eut des enfants ; mais Hérodote nous dit qu’elle était restée en Égypte. Selon Athénée (T.5b), comme pour Sappho, le nom de cette courtisane était Doricha (v. fr 15b ; cf. Strab.; Suid. ll. cc. ; Phot. s.v. Ῥωδώπιδος ἀνάθημα).