WWIII : POUTINE CONCOCTE DES SANCTIONS POUR LA COALITION. ISRAËL BIENTÔT ATTAQUE ET REDUIT A MENDIER DES SECOURS QUI N'ARRIVERONT PAS.

Publié le par José Pedro, collectif des rédacteurs dans LAOSOPHIE sur Overblog

WWIII : POUTINE CONCOCTE DES SANCTIONS POUR LA COALITION. ISRAËL BIENTÔT ATTAQUE ET REDUIT A MENDIER DES SECOURS QUI N'ARRIVERONT PAS.

Compte tenu des libertés que prend Netanyahu, le Premier Ministre Israélien, à Bombarder la Syrie, sans aucun mandat, et à faire plusieurs fois par semaines des incursions en Syrie, en Iran ou en Irak, ainsi qu'au Yémen, le Président Vladimir Poutine, qui l'avait prévenu de ne pas bouger dans la région, pour éviter de mettre le feu aux poudres, s'est rallié définitivement à l'intérieur de son camps des BRICS, soutient tous les Pays qu'Israël a en ligne de mire, et considère qu'Israël doit être traité comme l'axe du mal occidental.

Les avions Israéliens, ne pourront plus entrer en Syrie, sans être abattus, et les incartades dans le Golan, seront repoussées. Toutes attaques sur l'Iran déclenchera une riposte proportionnée soit sur des sites Militaires, soit sur des sites civils, dans la mesure ou des populations civiles seraient touchées par les raids israéliens.

TRUMP semble arrêter également de soutenir un allié qui l'entraîne dans des conflits avec la Russie.

L'ancien ambassadeur d'Israël en  Russie : "la dernière chose dont POUTINE a besoin, est une confrontation avec Israël", mais il semble que Poutine a pris ses distances et a déclaré "qu'il soutiendrait l'Iran, l'Irak, la Syrie, contre tout agresseur extérieur, y compris Israël.

Tsahal est habitué aux provocations gratuites dans les Pays de la région et principalement en Palestine, afin de réprimer les contre-manifestations, et les tirs à balles réelles sur des civils qui n'ont que des pierres à envoyer.

Le régime Israélien a prouvé dans ses 70 ans d'occupation de la Palestine, qu'il ne peut faire la Paix avec ses voisins, et qu'il recourt à la force, et aux Etats-Unis pour subsister dans la région. Les USA veulent rentrer chez eux, et se désengager du Moyen-Orient, en signant des contrats avec les Pays souverains, sans chercher à les agresser, et à redécouper le Moyen-Orient comme sous l'ère OBAMA-CLINTON. Dans les conditions d'extrémisme politique de la droite jusqu'au-boutiste  Israélienne, celle-ci devra abdiquer au profit d'une politique modérée, ou bien disparaître du paysage.

Suite à la reconnaissance par Israël de la destruction d'un réacteur nucléaire en Syrie en 2007, le ministre du Renseignement israélien a enfoncé le clou, déclarant qu'il « n’accepterait jamais l'apparition d'armes nucléaires » chez les pays qu'il juge hostiles à l'État hébreu, de quoi détruire tout le Moyen-Orient qui en possède par Pays interposés.

Est-ce la sécurité d'Israël ou son expansionnisme?

 

 
 
00:00/07:37

La terminologie détermine également le contenu. Les termes que vous employez indiquent votre perception de la question, votre position face à cette question et les problèmes et solutions que vous proposez face à cette dernière.

Donnons un exemple pour mieux comprendre : Si vous préférez employer le terme ‘Islam modéré’ alors ce sera l’Islam qui deviendra un problème en lui-même. Lorsque vous évoquez ce sujet ainsi, vous insinuez qu’il existe également un ‘islam radical, dur, djihadiste ou fanatique, mais que vous, vous optez pour l’approche selon laquelle ‘le meilleur islam est celui qui est modéré’. Comme je l’ai déjà évoqué lors de nos précédents programmes, si vous préférez employer le terme ‘l’Occident modéré’ vous aurez attiré l’attention sur le fait qu’en réalité l’Occident a causé beaucoup de dégâts pour l’humanité mais que lorsqu’il est modéré il pourrait avoir des contributions pour l’humanité, c’est pourquoi vous aurez mis l’accent sur le besoin d’un Occident modéré. Il manque deux choses qui attirent l’attention dans les analyses concernant le Moyen Orient et en particulier la crise syrienne. La première, est que des analyses sont parfois faites comme s’il n’y avait pas un pays tel qu’Israël au Moyen Orient. Comme c’est le cas pour la crise syrienne, Israël est négligé comme si ce pays n’était pas concerné par les crises qui sévissent au Moyen Orient. Alors que depuis la création d’Israël, les peuples du Moyen Orient vivent peut être la période la plus troublante de leur histoire. L’influence d’Israël est également parfois oubliée ou fait en sorte d’être oubliée dans la crise syrienne. Il faut accepter que la politique silencieuse et profonde d’Israël à laquelle les peuples du Moyen Orient ne sont pas très habitués, a une grande influence dans la formation de cette situation. Nous pouvons citer les noms d’un grand nombre de pays si l’on posait la question à savoir combien y’a-t-il de pays perdants dans la crise syrienne depuis qu’elle a commencée. Mais c’est peut être Israël qui est le pays à avoir obtenu le plus grand profit de cette crise. Car presque tous les pays considérés comme menace pour Israël, ont perdu de l’emprise avec l’apparition de cette crise. La Syrie mais également l’Iran, la Turquie et les pays arabes ont été sérieusement affectés par cette crise. Certains pays du Golfe qui se tenaient aux côtés des Palestiniens dans leur juste cause, ont pour autant dire actuellement l’apparence de former un bloc avec Israël.

D’un autre côté, les violations des droits de l’Homme et les politiques expansionnistes d’Israël, contre lesquelles s’opposent la communauté internationale, les défenseurs des droits de l’Homme et la conscience mondiale, attirent moins de réactions car toute l’attention est focalisée en Syrie.

La deuxième chose qui manque dans les analyses, est l’approche qui ne néglige pas Israël en général au Moyen Orient et en particulier dans la crise syrienne, mais qui traite la question dans le cadre de la sécurité d’Israël. Presque tous les analystes occidentaux et certains analystes originaires du Moyen Orient, donnent place au terme ‘sécurité d’Israël’ dans leur analyse. Lorsque nous regardons la question dans la perspective de la sécurité d’Israël, les dizaines d’erreurs commises au Moyen Orient légitiment pour autant dire toutes les atrocités d’Israël commises jusqu’à présent et qui continuent de l’être. Car si la question est celle de la sécurité, chaque pays est naturellement contraint de prendre les mesures nécessaires contre les menaces dirigées contre lui. Ici, un pays peut être le plus critiqué pour se comporter démesurément et pour violer les droits de l’Homme et les libertés fondamentales lorsqu’il prend ces mesures.

Alors que le problème qui perdure depuis un demi-siècle au Moyen Orient n’est pas la sécurité d’Israël mais sa politique expansionniste. La carte qui montre comment Israël a élargi ses terres de 1947 jusqu’à nos jours et qui est régulièrement partagée dans les médias, met très clairement en évidence cette réalité. Alors que dans les années 1946, les juifs vivaient dans certaines zones d’habitation déterminées, actuellement la situation s’est totalement inversée. Cette carte est l’expression claire et triste montrant à quel point l’espace de vie des Palestiniens s’est rétréci et pour autant dire transformé en une prison à ciel ouvert. La réponse d’un jeune gazaoui à la question du journaliste Mehmet Akif Ersoy lui demandant ‘quelle est ton rêve’, est comme le résumé de la triste situation de la transformation de leurs terres en prison à ciel ouvert. « Je souhaite pouvoir rouler à 180 kilomètres/heures sans être bloqué par aucun contrôle du côté israélien… » a répondu ce jeune gazaoui.

D’un autre côté, il n’y a pas d’indicateur montrant qu’Israël restera dans les limites qu’il possède actuellement. Bien que certains juifs soit instamment contre, ce n’est pas un secret que les juifs fanatiques, racistes et sionistes courent toujours derrière leur ‘idéal de ‘grand Israël’. Une petite enquête réalisée via internet, suffit largement à montrer cette réalité. Dans le cadre de leur idéal d’un ‘grand Israël’, les juifs sionistes prétendent leur revendication de ‘terres promises’ dans la région s’étalant du Tigre à l’Euphrate et où vivent les Arabes, Kurdes, Turcs et d’autres groupes ethniques. Actuellement, dans le cadre de la crise syrienne, la plus grande instabilité est vécue sur ces terres ‘promises’ revendiquées par les juifs racistes.

Lorsque nous observons les politiques suivies par Israël depuis sa création, ou encore lorsque nous regardons ses politiques régionales actuelles, nous constatons qu’Israël suit régulièrement une politique agressive. Le terme ‘sécurité d’Israël’ sert en fait à camoufler la politique agressive et expansionniste suivie par Israël depuis sa création. C’est la raison pour laquelle, la terminologie correcte devrait être l’expansionnisme d’Israël et non la sécurité d’Israël.

Israël/Palestine : penser les spécificités d'une situation coloniale

mardi 17 avril 2018 / DE : Dimitris Fasfalis

La "marche du Retour" réprimée dans le sang le 30 mars dernier par l’armée israélienne est un rappel tragique des violences exercées par l’État israélien à l’encontre des Palestiniens. Comment penser ce conflit en termes politiques alors que les raisons d’État essaient d’en imposer une lecture ethnique ? Le "colonial" semble en ce sens offrir une catégorie féconde.

Raisons d’État et (dé)raisons communautaires

"Nous ne cèderons rien à l’antisionisme car il est LA forme réinventée de l’antisémitisme". D’un côté, cette déclaration d’Emmanuel Macron, qui est un sioniste, et qui traite antisémitisme les rabbins qui n'en sont pas, en complicité avec Benyamin Nétanyahou, premier ministre israélien, le 16 juillet 2017 lors de la commémoration officielle des rafles du Vel d’Hiv’ à Paris.

De l’autre, l’angoisse d’un historien israélien, Zeev Sternhell, spécialiste du fascisme et des nationalismes européens du tournant du XXe siècle, défenseur des Lumières, telle qu’elle transparaît dans une tribune au Monde le 20 février dernier. A propos des propositions de loi dites "fondamentales", c’est-à-dire constitutionnelles, avancées par les droites nationalistes et religieuses à la Knesset, en janvier 2018, il écrit : "Grâce à l’impuissance de la gauche, cette législation servira de premier clou dans le cercueil de l’ancien Israël, celui dont il ne restera que la déclaration d’indépendance, comme une pièce de musée qui rappellera aux générations futures ce que notre pays aurait pu être si notre société ne s’était moralement décomposée en un demi-siècle d’occupation, de colonisation et d’apartheid dans les territoires conquis en 1967, et désormais occupés par quelque 300 000 colons. Aujourd’hui, la gauche n’est plus capable de faire front face à un nationalisme qui, dans sa version européenne, bien plus extrême que la nôtre, avait presque réussi à anéantir les juifs d’Europe. C’est pourquoi il convient de faire lire partout en Israël et dans le monde juif les deux entretiens faits par Ravit Hecht pour Haaretz (3 décembre et 28 octobre 2017) avec Smotrich et Zohar. On y voit comment pousse sous nos yeux non pas un simple fascisme local, mais un racisme proche du nazisme à ses débuts."

A l’heure des décompositions démocratiques en Europe au sein desquelles s’épanouit l’antisémitisme assassin des Mohamed Merah, du "gang des barbares" et de l’assassin de Mireille Knoll, l’amalgame entre antisémitisme et antisionisme opéré par le président français entretient et consolide une confusion qui, très probablement, risque de favoriser l’antisémitisme-même que ce discours entend combattre. Car au lieu de politiser le conflit israélo-palestinien, la déclaration d’Emmanuel Macron le communautarise, c’est-à-dire la ramène au degré zéro de la politique, celui des origines ethniques et des appartenances confessionnelles.

Alors que l’ethnicisation du conflit fait le jeu des droites extrêmes - israéliennes et européennes - les gauches internationalistes ont depuis longtemps construit des ressources critiques pour déplacer l’affrontement sur un terrain politique et non plus ethnique. C’est justement ce pas de côté qui faisait dire à ce "juif non-Juif" et communiste hérétique qu’était Daniel Bensaïd : "Politiquement et moralement, je me sens plus proche d’un Elias Sanbar, d’une Leïla Shahid, d’un Edward Saïd, de militants et d’intellectuels palestiniens ou arabes, que d’un Shmuel Trigano, d’un Alain Finkielkraut, d’un Bernard-Henri Lévy, d’un Pierre-André Targuieff, d’un Laurent Fabius ou d’un rabbin Sitruk." ("Approches internationalistes de la question juive", archives personnelles publiées par www.danielbensaid.org, probablement en 2007).

En ce sens, pour re-politiser le conflit israélo-palestinien, le "colonial" semble être une catégorie incontournable pour penser ce conflit, ses violences, ses résistances, sa répression. L’accusation de colonialisme est l’un des premiers arguments qu’ont évoqués les opposants juifs au sionisme - et parmi eux des juifs internationalistes - dès la fin du XIXe siècle. C’est ce que soulignent chacun à leur manière Yakov Rabkin dans Au nom de la Torah : une histoire de l’opposition juive au sionisme (Sainte-Foy, Presses de l’Université Laval, 2004) et Daniel Bensaïd dans ses "Approches internationalistes de la question juive".

Avant 1947

Les manières de penser le fait colonial sur le terrain de la Palestine historique renvoient donc à une longue durée de plus d’un siècle dans laquelle les évolutions sont nombreuses jusqu’à nos jours. En ce sens, il n’est pas inutile de rappeler que les fondateurs du sionisme assumaient entièrement le caractère colonial de leur projet politique.

Cela est vrai du journaliste autrichien Theodor Herzl, père spirituel de l’Etat d’Israël, qui inscrit la constitution d’un État-nation juif en Palestine dans le cadre plus large de la mission civilisatrice européenne. Il écrit dans Der Judenstaat (1896) que la formation d’un tel État en Palestine est dans l’intérêt de l’Europe car "nous formerions là-bas un élément d’un mur contre l’Asie, ainsi que l’avant-poste de la civilisation contre la barbarie". (Cité par Michaël Séguin, "Conceptualiser la colonialité d’Israël", Cahiers d’histoire. Revue critique d’histoire. Cela est vrai également d’autres fondateurs idéologiques du mouvement sioniste comme le philosophe socialiste allemand Moses Hess ou bien du médecin polonais Leo Pinsker à la tête des "Amants de Sion" en Palestine à partir de 1884 et qui sont d’ailleurs à l’origine des premières colonies agricoles. Enfin, on voit dans la presse arabe et l’intelligentsia palestinienne au début du XXe siècle l’apparition de la préoccupation conjointe du contrôle des terres et des ambitions nationales des colons sionistes.

Anticolonialisme et libération nationale (années 1960 et 1970)

Après la proclamation de l’État israélien en 1947, la première guerre israélo-arabe et l’expulsion d’environ 750 000 Palestiniens de leurs terres, de nouvelles manières de penser le nouvel État émergent. Fayez Sayegh, fondateur du centre de recherche de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP) à Beirouth, offre l’exemple d’un premier courant critique qui s’affirme des années 1950 aux années 1970. Dans Zionist Colonialism in Palestine (1965), Sayegh soutient que le projet politique qu’incarne Israël est associé à l’impérialisme occidental tout en présentant des spécificités qu’il s’efforce de saisir. Premièrement, les colons sionistes ne poursuivent pas des fins d’enrichissement personnel ou d’expansion impériale. Ils œuvrent à la construction d’un État-nation pour les Juifs du monde. Deuxièmement, ils visent à se substituer aux habitants autochtones de la Palestine et non pas à les soumettre et les dominer. Troisièmement, seul le soutien des puissances impérialistes peut assurer le succès du projet sioniste face à la résistance des Arabes de Palestine.

Prenant acte de l’épuration ethnique pratiquée au cours de la guerre de 1947-48, du racisme et de la violence inhérente au projet sioniste, il soutient que le but suprême du sionisme "a été et reste toujours la création d’un État qui englobe toute la Palestine (appelée par les sionistes "Eretz Israël" ou Terre d’Israël) entièrement, débarrassée des Arabes." (Cité par Michaël Séguin, loc. cit., p. 140).

La Charte nationale palestinienne de 1968, rédigée par l’OLP, adopte le même cadre conceptuel au sujet d’Israël et du sionisme, ce qui est illustré notamment par son article 22 qui stipule : "Le sionisme est un mouvement politique organiquement lié à l’impérialisme international et opposé à toute action de libération et à tout mouvement progressiste dans le monde. Il est raciste et fanatique par nature, agressif, expansionniste et colonial dans ses buts, et fasciste par ses méthodes. Israël est l’instrument du mouvement sioniste et la base géographique de l’impérialisme mondial, stratégiquement placé au cœur même de la patrie arabe afin de combattre les espoirs de la nation arabe pour sa libération, son union et son progrès. Israël est une source constante de menaces vis-à-vis de la paix au Proche-Orient et dans le monde entier. Étant donné que la libération de la Palestine éliminera la présence sioniste et impérialiste et contribuera à l’instauration de la paix au Proche-Orient, le peuple palestinien compte sur l’appui de toutes les forces progressistes et pacifiques du monde et les invite toutes instamment, quelles que soient leurs affiliations et leurs croyances, à offrir aide et appui au peuple palestinien dans sa juste lutte pour la libération de sa patrie."

Au cours de ces mêmes années "soixante-huit" et en parallèle au mouvement palestinien de libération nationale s’élabore une critique anti-coloniale d’Israël par des auteurs juifs dissidents. Le sociologue et orientaliste marxiste Maxime Rodinson publie en juillet 1967 dans les Temps modernes de Jean-Paul Sartre (numéro consacré au conflit israélo-palestinien) son article qui pose la question : "Israël, fait colonial ?" Rompant les rangs communautaires, Rodinson tentait de démontrer à partir d’une lecture de l’histoire du sionisme en Palestine que "la formation de l’État d’Israël sur la terre palestinienne est l’aboutissement d’un processus qui s’insère parfaitement dans le grand mouvement d’expansion européo-américain des XIXe et XXe siècles pour peupler ou dominer économiquement et politiquement les autres terres". La mentalité coloniale attribuant à toute population européenne une supériorité civilisationnelle intrinsèque par rapport aux autres peuples et civilisations du monde - cette mentalité, soutenait Rodinson, était présente même au sein de cette minorité persécutée et subalterne du début du XXe siècle qu’est le monde juif européen.

Cette conception était également partagée par l’Organisation socialiste israélienne (en hébreu, Matzpen ou Matspen). Selon le témoignage de Michel Warchawski qui y adhère en 1968, cette organisation devient rapidement le "répondant local", c’est-à-dire israélien, de cette révolte globale qu’a été Mai 1968. (Cf. Michel Warchawski, "A Karameh, le baptême du feu de la résistance palestinienne", L’Anticapitaliste, no. 424, 5 avril 2018). Dans The Other Israel, paru en 1972, le militant de Matzpen, Arie Bober, écrit : "Loin d’offrir un refuge pour les Juifs persécutés du monde, l’État sioniste mène les nouveaux immigrants comme les anciens colons [settlers] vers un nouvel holocauste en les mobilisant dans une entreprise coloniale et une armée contre-révolutionnaire contre la lutte des masses arabes pour la libération nationale et l’émancipation sociale." (Cité par Michaël Séguin, loc. cit., p. 141-142).

Le tournant critique des sciences sociales (fin des années 1980)

A la fin des années 1980, une nouvelle générations d’historiens renouvellent le questionnaire de l’historiographie israélienne et s’attaquent au récit fondateur de la victoire de 1948 pour en offrir une version qui cherche à restaurer le point de vue palestinien de la Nakba et déconstruire l’histoire officielle israélienne. Partant d’archives nouvellement accessibles, ces historiens remettent donc en cause à la fin des années 1980 l’histoire académique dominante sur la fondation d’Israël et seront rapidement ostracisés dans leur champ disciplinaire.

Outre la critique du narratif dominant de la "guerre d’indépendance" de 1947-48 que l’historiographie officielle montrait comme un événement héroïque où les forces armées juives étaient en position d’infériorité numérique face aux armées arabes, les nouveaux historiens ont surtout mis en lumière les enjeux liés au départ des 750 000 Palestiniens au cours de cette guerre. Aux yeux de la version officielle de la guerre, ce départ était un dommage collatéral de la guerre. En s’appuyant sur les archives du gouvernement, de l’armée et des institutions du Yishouv (la communauté juive de Palestine avant 1948), ainsi que des archives personnelles de dirigeants Benny Morris écrit The Birth en 1987 pour montrer que le plan Dalet avait pour but de terroriser puis d’expulser les civils Palestiniens, il n’était pas pour autant un plan d’expulsion. Opposé à cette interprétation, Ilan Pappé interprète ce départ des Palestiniens suivant le paradigme de "nettoyage ethnique" et non plus sous l’angle de la "guerre". Il est l’auteur de La guerre de 1948 : aux origines du conflit israélo-arabe (La Fabrique éditions, 2000, 389 pages). A la différence de Benny Morris, il s’appuie aussi sur des sources orales pour exhumer les circonstances de cet événement.

Parallèlement au "débat postsioniste" déclenché par ces "nouveaux historiens" dans l’espace public et académique en Israël à la fin des années 1980, des sociologues renouvellent les savoirs sur la situation coloniale spécifique au conflit israélo-palestinien. Baruch Kimmerling publie Zionism and Territory en 1983. Il y met en évidence l’éthos que le Yishouv a dû développer pour conquérir et contrôler les terres palestiniennes. Sa démarche wébérienne insiste sur la propriété, la présence et la souveraineté pour prendre contrôle du territoire : l’acquisition de terres, notamment par le biais du Fonds national juif, a pour but de s’assurer que les terres acquises ne puissent retourner entre des mains non juives. La formation de colonies agricoles permet une présence sur les terres acquises mais aussi la conquête du travail et des marchés en assurant l’existence de travailleurs et de consommateurs exclusivement juifs. La souveraineté enfin s’exerce par les nouveaux occupants des terres palestiniennes contre les fellahen dépossédés, y compris par les armes.

C’est également la problématique de la situation coloniale qui se trouve au cœur des travaux de Gershon Shafir dans Land, Labor and the Origins of the Israeli-Palestinian Conflict 1882-1914 (https://books.google.fr/books/about/Land_Labor_and_the_Origins_of_the_Israel.html?id=OBzoJJGUAvUC&redir_esc=y) publié en 1989. Dans la formation historique des rapports économiques entre société juive colonisatrice et société autochtone/palestinienne colonisée, la délimitation des frontières nationales israéliennes sur une base ethnique a également une incidence sur la société juive elle-même : "Les Yéménites, ainsi que d’autres Juifs misrahim, furent incorporés dans la société israélienne, mais placés dans une position d’infériorité sur le marché du travail et dans la structure sociale, alors que les Arabes palestiniens furent définitivement exclus, même comme force de travail." (Cité par Michaël Séguin, loc. cit., p. 144). Exclusivisme ethnique et nettoyage ethnique seraient donc deux corolaires de cette manifestation tardive d’expansionnisme européen que serait Israël selon Gershon Shafir. Les misrahim, c’est-à-dire les Juifs orientaux, ont également fait l’objet de recherches par les courants des Cultural Studies et des Postcolonial Studies, sous l’influence d’Edward Said et de Franz Fanon. C’est le cas de l’article pionnier d’Ella Shohat, "Sephardim in Israel : Zionism from the Standpoint of its Jewish Victims" paru en 1988 dans la revue Social Text. S’appuyant sur le discours de politiciens, de journalistes et de chercheurs, elle met en évidence le traitement discriminatoire et l’infériorisation symbolique des Juifs arabes à leur arrivée en Israël dans les années 1950 en raison des représentations orientalistes qui faisaient des misrahim des êtres inférieurs, proche en cela des Palestiniens, des Arabes, des musulmans.

Settler Colonial Studies (années 2000)

Dans le sillage de l’ensemble de ces travaux, les années 2000 voient l’affirmation d’un autre courant de recherche, les Settler Colonial Studies, qui prolonge les acquis antérieurs tout en ouvrant de nouvelles voies pour la compréhension du conflit en cours. Lorenzo Veracini explique dans son introduction au no. 1 de la revue Settler Colonial Studies (2011) que le colonialisme et le colonialisme de peuplement sont tous deux une domination étrangère/exogène. Mais dans le second cas, c’est la poursuite d’installation de colons et de fondation d’une nouvelle société en substitution à la société autochtone qui prévaut, alors que dans le premier cas, le colonialisme classique, c’est l’enrichissement ou la puissance de la métropole qui est le but de la colonisation.

Lorenzo Veracini propose dans Israel and Settler Society (2006) de comprendre le conflit israélo-palestinien non pas dans sa singularité comme le fait la vision dominante mais suivant ses points communs et ses liens avec les autres colonialismes de peuplement. Il compare de la sorte les mouvements sioniste et afrikaner pour conclure qu’ils favorisent tous deux une séparation entre groupes ethniques/raciaux, aboutissant dans les deux cas à une territorialisation de cette politique de ségrégation (apartheid). Ensuite, les stratégies répressives des autorités israéliennes lors de la seconde Intifada (2000-2005) sont comparées à celles de la France coloniale en Algérie (1954-1962) pour en conclure que les deux cas partagent des similarités dans la brutalité et les méthodes répressives employées. Enfin, la mise en relation de l’historiographie israélienne avec l’historiographie australienne permet à l’auteur de mettre en évidence une même logique de réécriture de l’histoire et de négation de la violence au fondement des deux États concernés.

C’est d’ailleurs les violences symboliques qui concentrent l’attention de toute une série de travaux récents sur le sionisme. L’historien Gabriel Piterberg passe en revue dans The Returns of Zionism (2008) des travaux littéraires, sociologiques et historiques israéliens afin d’interroger l’imaginaire politique sioniste. La thèse de Piterberg est que cet imaginaire politique permet l’effacement de la présence palestinienne car il opère en tant que récit colonial à partir de l’héritage de l’historicisme et du romantisme allemand du XIXe siècle, indissociables du colonialisme. Nur Masalha explore la même dimension dans The Palestine Nakba (2012) où il examine plus concrètement les différents moyens employés par Israël pour effacer la présence palestinienne : toponymie désarabisée, plantation de forêts pour européaniser l’environnement et effacer la trace de villages palestiniens, spoliation de collections, de bibliothèques et d’archives palestiniennes, réécriture de l’histoire en confisquant la parole des Palestiniens sont les moyens analysés ici. Parallèlement, The Palestine Nakba est un plaidoyer méthodologique pour l’histoire orale afin de décoloniser l’histoire et accéder à la voix des subalternes.

Il est devenu courant aujourd’hui de déplorer le retour des guerres de religion, des haines identitaires, des obsessions d’appartenance. La question palestinienne et le conflit israélo-palestinien n’en sont qu’un des terrains où l’on peut voir l’affaissement des cultures politiques développées au XXe siècle. L’échec des mouvements historiques d’émancipation du XXe siècle marque à la fois la société israélienne, les Palestiniens, le monde arabe et les sociétés européennes comme la nôtre. Pour "renouer le fil" (Daniel Bensaïd) avec l’émancipation, penser/agir à partir de la problématique du fait colonial, ici et là-bas, semble donc une voie stratégique pour construire des appartenances, des identités, des liens entre sujets politiques à part entière.

Tsahal et Iran : les mots qui mènent au choc frontal

Tsahal et Iran : les mots qui mènent au choc frontal
En savoir plus sur http://www.jforum.fr/tsahal-et-iran-les-mots-qui-menent-au-choc-frontal.html#xZpzltWEAu8w

 

Tsahal et Iran : les mots qui mènent au choc frontal
En savoir plus sur http://www.jforum.fr/tsahal-et-iran-les-mots-qui-menent-au-choc-frontal.html#xZpzltWEAu8wdtx6.99

http://www.jforum.fr/wp-content/uploads/2018/04/guerre-israel-iran-1021x580_869_579-696x464.jpg

L’escalade de la guerre des mots pousse Tsahal et les Gardiens de la Révolution plus proches que jamais de l’affrontement

https://s3-us-west-2.amazonaws.com/debka/wp-content/uploads/2018/04/17123132/f-15-ISRAEL-Attack-17.4.18.jpg

Un communiqué inhabituel de Tsahal, mardi 17 avril, a divulgué des détails sur les bases de drones de l’Iran en Syrie et donné les noms de leurs commandants, alors que les menaces échangées entre les deux camps montent en décibels.

Ces révélations et leur tonalité marquent un contraste saisissant avec le silence étrange du gouvernement israélien et des chefs de la sécurité, et leur acquiescement passif à l’accumulation constante de ses atouts militaires en Syrie, au cours de ces deux dernières années.

L’information qui est à présent dévoilée atteste de la conviction croissante parmi les dirigeants stratégiques d’Israël, que les Gardiens de la Révolution Iranienne (CGRI) sontsur lepoint de mener une opération militaires en représailles contre l’attaque aérienne d’Israël contre la base T-4 syrienne, qui a causé la mort d’au moins huit officiers de l’aérospatiale du CGRI, dont le colonel Mehdi Deghan Yazdeli. Tsahal élève finalement, le niveau de la menace de façon à préparer le public israélien pour ce qui ressemble à présent comme une confrontation militaire inévitable avec l’Iran.

Une fuite en direction du New York Time et des médias israéliens, lundi, a défini,de façon inexacte, la frappe contre T-4 comme la première attaque contre des commandants iraniens vivants. En fait, les forces aériennes israéliennes ont déjà frappé un groupe de commandants iraniens en visite secrète à Quneitra,juste en face de la frontière israélienne du Golan, le 18 janvier 2015, tuant deux généraux iraniens, Mohammad Ali Allah Dadi and Abu Ali al-Tabtabani. L’année suivante, le 26 juillet, une attaque israélienne à la roquette  a visé et manqué un autre visiteur secret  à Quneitra : le Général iranien Mohammad-Reza Naghdi.

Jusqu’à présent , DEBKAfile est en mesure d’annoncer que :

Le chef des Brigades Al Quds,Qassem Soleimani dirige les préparatifs en vue d’une première offensive iranienne directe contre Israël, et pas par le biais de supplétifs. Soleimani est le commandant global de tous les fronts iraniens au Moyen-Orient.

Les unités des forces aériennes iraniennes s’équipent en prévision de l’attaque.

Des avions-cargo militaires Illiouchin-76, maquillés sous l’allure de vols commerciaux d’Iranian Simorgh Air et Pouya Air, transportent du matériel militaire lourd en Syrie.

La flotte aérienne des gardiens de la révolution est répartie sur quatre bases syriennes à l’extérieur d’Alep, près de Saiqal, Damas et sur la base T-4 près de Homs.

Adaptation : Marc Brzustowski

Changement de régime: Israel devient l’Etat du peuple juif et Juif devient une nationalité

Israël fait actuellement le chemin inverse de certaines démocraties occidentales. Israël va vers plus de clarté quand l’Europe étend son identité au tout venant. Une loi va passer pour les 70 ans d’Israël qui va mettre fin à la cohabitation forcée avec les arabo-musulmans qui ne se définissent pas comme israéliens. Cette route et ce chemin ne semble pas être celui de la Paix, mais celui du chant du cygne.

Le 15 mars 2018, le Comité de la Knesset a approuvé les principes de la Loi fondamentale qui définit l’État d’Israël comme « État nation du peuple juif ». Le Parlement doit, dans les toutes prochaines semaines, élaborer et approuver la version définitive du texte. Pour le Président du Comité, Amir Ohana, il s’agit de « la Loi de toutes les Lois ». De son côté, le Ministre du Tourisme Yariv Levin, l’a qualifiée de « projet de Loi phare du sionisme » qui « remettra Israël sur le bon chemin, à savoir que c’est l’État nation du peuple juif ».

Inversement, la députée palestinienne de la Knesset, Aida Touma Souleiman, a critiqué le projet de Loi estimant qu’il institutionnalisera, de façon flagrante, un régime d’apartheid (sic).

Parmi les mesures majeures, « l’arabe » ne sera plus une langue officielle de l’État juif (à côté de l’hébreu, principe repris de la version proposée par Avi Dichter en 2011). Le Droit à l’autodétermination y est réservé au seul peuple juif et Jérusalem en est bien sa capitale. Sur le plan migratoire, le texte conserve les principes précédemment adoptés, à savoir que la mission d’Israël est de rassembler les exilés et d’accorder un droit au retour aux seuls membres de la communauté juive qui veulent s’y établir.

Pour autant, la finalité essentielle de la Loi sur l’État nation du peuple juif vise à corriger la contradiction issue de la Loi fondamentale de 1992 sur « la dignité humaine et la liberté » qui a défini l’État d’Israël comme un « État juif et démocratique ».

Sur le fondement de la Loi de 1992, des groupes palestiniens d’Israël se prétendant comme défendant « les droits de l’homme » ont présenté des requêtes devant les tribunaux pour qu’Israël respecte la notion d’égalité.

De même, le député palestinien de la Knesset Azmi Bishara, avait bien compris la faiblesse du système institutionnel israélien, la Loi de 1992 étant susceptible de devenir l’instrument légal de la destruction de l’État juif. Il avait alors, avec un groupe de députés palestiniens de la Knesset, diffusé un document intitulé « une vision de l’avenir » exigeant d’Israël qu’il se transforme en une « démocratie civique », c’est à dire « une démocratie consensuelle » où tous les citoyens auraient les mêmes droits. Le service de police Shin Bet avait du intervenir publiquement en qualifiant le document de « subversif » et en assurant « contrecarrer » toute entreprise dans ce sens.

L’affaire Kaadan a (une nouvelle fois) mis le problème en lumière : un citoyen palestinien d’Israël, Adel Kaadan (arabe israélien) avait saisi la Cour suprême israélienne pour être autorisé à vivre dans l’une des communautés exclusivement juive d’Israël. Il en avait été refusé par un comité d’admission qui avait bloqué son accès dans la collectivité. Ses avocats avaient alors invoqué l’existence d’une discrimination à l’égard des palestiniens d’Israël qui ne pouvait s’établir dans le lieu de leur choix.

Le Gouvernement de Netanyahou avait du intervenir, en 2011, pour régler le problème en donnant une base légale à ces « comités d’admission ».

 

Aussi, la Ministre de la Justice, Ayelet Shaked, a-t-elle invoqué l’affaire Kaadan pour justifier l’adoption de la Loi sur l’État nation du peuple juif : «Il est normal qu’une communauté juive soit, par définition, seulement juive ».Elle a donc annoncé entreprendre une « révolution constitutionnelle » pour remettre en question la loi fondamentale de 1992 sur la liberté et la dignité humaine afin de « remettre droite la voie ferrée, tordue il y a un quart de siècle ».

La Ministre de la Justice a alors lié le projet de loi sur l’État nation du peuple juif à d’autres révisions qu’elleentend apporter, notamment à la loi fondamentale relative aux pouvoirs de la Cour suprême. Avec la Loi de 1992, «  les décisions de justice au cours des 20 dernières années, ont fait référence aux valeurs universelles et non au caractère juif de l’État ». Désormais, la Cour Suprême israélienne ne pourra plus s’ériger en qualité de législateur et décider de la norme applicable (violant ainsi le principe de séparation des pouvoir). Elle se référera uniquement à la judéité de l’État.

Bien évidemment, pour les palestiniens d’Israël (que l’État juif appelle, historiquement, les « arabes israéliens »), la Loi sur l’État Nation du Peuple juif empêchera de faire d’Israël une démocratie normale de type occidentale. Par ailleurs, elle devrait encourager l’annexion des territoires de la zone C de Cisjordanie (sous contrôle civil, administratif et militaire exclusivement israélien en vertu des accords israélo-palestiniens de paix, dits d’Oslo). Ainsi, les détracteurs du projet, juifs ou non, critiquent-ils le texte au motif que l’État d’Israël ne sera pas «juif et démocratique» mais deviendra une « ethnocratie non démocratique ».

Il n’en est rien. La Loi sur l’État Nation du peuple juif n’est qu’une application du « Droit des peuples à disposer de lui même » : le peuple juif est libre de décider de son cadre institutionnel et des orientations philosophiques de sa société, sans l’interférence de tiers n’appartenant pas la nation juive.

Sur ce point, la présence de « députés palestiniens » qui siègent au sein de la Knesset est une parfaite aberration que la Loi nouvelle devrait régler, en l’interdisant. Israël appliquera alors la règle en vigueur dans les démocraties occidentales : les non nationaux ne peuvent être électeurs ou éligibles à l’occasion des scrutins nationaux. Ils le seront uniquement à l’occasion des scrutins locaux. Bien évidemment, les députés palestiniens de la Knesset pourront toujours apporter leur connaissance et leur maîtrise du fonctionnement démocratique des institutions, pour aider l’Autorité Palestinienne (dans les zone A et B de Cisjordanie) et le Gouvernement d’Ismaël Hanyieh (dans la bande de Gaza) à les mettre en place dans les territoires qu’ils contrôlent.

De même, et grâce la Loi sur l’État Nation du peule juif, Israël pourra définir qui en sont les membres, à savoir ceux dont la mère et juive ou ceux qui se sont convertis au judaïsme, tout comme le Code civil français définit qui est français ou comment il est possible d’acquérir la nationalité française.

S’agissant de la présence sur le territoire, Israël pourra étendre la Loi du 8 mars 2018 (sur le retrait du titre de résident permanent des palestiniens et leur expulsion, en cas de manquement à l’obligation de loyauté a l’égard d’Israël), à toute personne, juive ou non, qui porterait atteinte aux intérêts supérieurs de la Nation juive.

Enfin, l’État d’Israël pourra offrir aux juifs de diaspora (qui le souhaitent), en la subordonnant aux respects de conditions qu’il décidera, le bénéfice de la nationalité israélienne puisqu’ils font partie de la Nation juive et qu’Israël est leur État nation. La nationalité est, en effet, le lien juridique qui relie un individu à son État, quelque soit son lieu de résidence. (Tout comme ceux qu’Israël appellent « les arabes israéliens » sont bien des palestiniens pour les institutions palestiniennes).

Ainsi, le Premier Ministre Benjamin Netanyahou n’aura plus à attendre des palestiniens qu’ils reconnaissent Israël comme État juif, mais juste qu’ils en prennent acte. De même, le statut de Jérusalem et sa judéité ne seront plus sujet à discussion (pas plus que le caractère palestinien de Ramallah, Jenine ou de Tulkarem).

Tout à fait curieusement, le Gouvernement français a eu l’occasion de s’exprimer sur le projet de Loi définissant Israël comme étant « le foyer national du peuple juif » (JO Sénat 17/01/2018 p 22).

Après avoir indiqué « qu’il n’appartient pas à la France de se prononcer sur les discussions de parlementaires étrangers. De même, il nous serait sans doute difficile d’accepter le regard d’autres États sur nos propres débats », le secrétaire d’État du Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères a indiqué que le texte suscitait des préoccupations pour la France (sic).

La première tiendrait au risque de discrimination à l’égard de la population arabe. Que la France se rassure : Israël distinguera comme la France, les nationaux, les non nationaux en situation régulière, et les non nationaux en situation irrégulière. Les arabes israéliens feront partie de la seconde catégorie et ne subiront aucune discrimination.

La seconde préoccupation porterait sur la conformité de ce projet à la solution à deux États, et le risque de discrimination entre citoyens juifs et arabes qui en constituerait un obstacle. Il n’en est rien. Les palestiniens peuvent toujours décider de créer un État palestinien sur les territoires de la zone A et B de Cisjordanie, et un autre sur la Bande de Gaza, puisque tel est la réalité géopolitique. Les arabes israéliens pourront alors s’inscrire sur les listes électorales palestiniennes et participer aux scrutins nationaux palestiniens.

La troisième préoccupation de la France concernerait Jérusalem. Le secrétaire d’État a juste mentionné (de façon évasive) que la position de la France était constante et que le Président de la République avait évoqué certains points avec le Premier Ministre israélien, en particulier celui de la « colonisation » (sic). Jérusalem est la capitale d’Israël depuis sa naissance et les implantations juives se situent sur la zone C de Cisjordanie. Il n’y a donc pas de colonisation.

En conclusion, il est indiqué que « le climat est tendu en ce moment et qu’il vaut mieux y regarder à deux fois avant de le tendre un peu plus ». Sur ce point, rappelons au gouvernement français que le climat est tendu depuis le 15 mai 1948, lorsque les États arabes de la région ont déclaré la guerre à Israël (le lendemain de sa naissance), que les tensions se sont poursuivies lorsque la Charte de l’Olp de juillet 1968 a institué le peuple palestinien et s’est fixée de détruire l’entité sioniste sur un fondement national, et qu’enfin, elles ont été ravivées avec la Charte du Hamas de 1987 qui a enjoint aux palestiniens de détruire Israël, sur injonction d’Allah.

Pour le 70ème anniversaire de sa naissance, Israël devrait donc honorer sa vocation historique, n’en déplaise aux palestiniens et à la communauté internationale.

par Bernard RAMAS-MUHLBACH

Jérôme Gygax, Docteur en relations internationales de l’IHEID

Docteur en relations internationales de l’Institut de hautes études internationales et du développement (IHEID, Genève), Jérôme Gygax est historien, chercheur associé à la fondation Pierre du Bois pour l’histoire du temps présent. Ses travaux portent sur l’histoire des idées, les nouvelles formes de diplomatie, l’utilisation des médias dans la naissance du soft power. Il s’intéresse aux relations entre le secteur public et privé, au rôle des réseaux et leur impact dans la politique internationale.  

Publications récentes : Jérôme Gygax et Nancy Snow, « 9/11 and the  Advent of Total Diplomacy : Strategic Communications as a primary Weapon of War » ds Journal of 9/11 Studies, Vol 38, July 2013 ; J. Gygax, Olympisme et Guerre froide culturelle, le prix de la victoire américaine, Paris, L’Harmattan, 2012.

La décision prise par l’administration de Donald Trump de consacrer Jérusalem comme capitale de l’état d’Israël[1] s’accorde avec l’idéologie sioniste d’un droit présumé exclusif d’Israël sur l’ancienne cité de Jérusalem[2]. Selon l’historien israélien Ilan Pappe, le sionisme a construit un mythe « réécrivant l’histoire de la Palestine, et celle du peuple juif, de façon à prouver scientifiquement la prétention juive à la « Terre (sacrée) d’Israël »[3]. Aujourd’hui la plupart des Israéliens méconnaîtraient ainsi les sources de leur propre histoire[4]. Rappelons qu’étant le foyer des trois grands monothéismes, la ville sainte fut reconnue en tant que zone internationale par l’ONU (résolution 181-11) du 29 novembre 1947 avant son annexion illégale par Israël à l’issue de la Guerre dite des « Six jours » du 5 au 10 juin 1967[5]. Pourquoi donner raison au mythe contre l’histoire ? Qu’a-t-on fait des dépossessions des arabes palestiniens, des destructions et des violences systématiques ? Comment ont-elles été commises au nom d’un prétendu droit biblique envers et contre le droit international et coutumier ?[6]

Le mouvement sioniste, né à la fin du 19ème siècle, acquit un rôle significatif dans le cours de la Première Guerre mondiale, en partie grâce au concours apporté au gouvernement britannique, afin de faire entrer les Etats-Unis dans la Grande guerre[7]. La couronne anglaise avait promis en retour son appui à la cause nationale du peuple juif[8]. C’est ainsi qu’en 1917 le ministre des affaires étrangères britannique Lord Balfour s’engageait formellement par écrit auprès de Lord Rothschild, éminent sioniste, afin de créer le premier foyer national juif en Palestine une fois la guerre terminée[9]. Selon l’historienne Alison Weir, les sionistes pesèrent de tout leur poids afin d’empêcher la signature d’une paix séparée entre les forces alliées et l’Empire Ottoman, contre les initiatives du département d’Etat américain[10]. Pour les sionistes, tout armistice prématuré en Orient aurait empêché la « récupération » des territoires de Palestine une fois la guerre terminée[11]. L’historien Allen Murphy expose, dans un ouvrage paru en 1982, comment Felix Frankfurter (1882-1965) juge à la cour suprême des Etats-Unis de 1939 à 1962 et Prof. à la Harvard Law School[12], a travaillé avec l’avocat et juge à la cour suprême Louis Brandeis (nommé à ce poste par le Président Wilson en 1916), afin de construire un réseau de soutien au sionisme aux Etats-Unis et ce, durant près de vingt-cinq années[13]. Brandeis appartenait à une société secrète appelée les « Parushim » qui, selon la prof. Dr. Sarah Schmidt, était comme « Une organisation de guérilla secrète déterminée à influencer le cours des événements de manière silencieuse et anonyme. »[14]

Au moment de l’ouverture de la Conférence de paix de Paris, débutée en janvier 1919, le président états-unien W. Wilson, soucieux de connaître la situation sur le terrain, avait dépêché une commission d’enquête en Palestine, auteure du rapport King-Crane. Selon cette commission, tout exercice de pressions économiques ou sociales sur les habitants de Palestine représentait une « violation du principe d’autodétermination et des droits de ces populations »[15]. Brandeis obtint, avec l’appui de Frankfurter, la censure de ce rapport jusqu’à ce que les accords de Versailles soient signés (août 1920)[16].

Depuis les années trente, les organisations sionistes armées menaient des séries d’attentats afin de produire un exode vers la terre « d’Israël », comme par exemple en Irak, jusqu’au début des années 1950[17]. Les Sionistes avaient développé la capacité de mener des opérations d’influence au niveau international afin d’assurer la pérennisation de leur projet en Palestine[18]. L’une des victimes d’un tel acte fut l’envoyé de l’ONU, le comte Folke Bernadotte, assassiné alors qu’il tentait de modifier le plan de partage de la Palestine, élaboré par les sionistes, et qui menaçait la réussite de leur entreprise[19].

D’autre part, un puissant mouvement de lobbying pro-sioniste étendait son action jusqu’au sein du Congrès des Etats-Unis[20]. L’un des sénateurs républicains d’origine juive, Jacob K. Javits, membre de la Chambre des Représentants depuis janvier 1947, partisan de la cause sioniste, confiait après la guerre: «Nous nous battrons jusqu’à la mort et créeront une Etat juif en Palestine, même si c’est la dernière œuvre que nous accomplissons. »[21]  Lors de la guerre de fondation, marquée par la déclaration d’indépendance de l’Etat d’Israël, le 14 mai 1948, de nombreuses communautés dénoncèrent les brutalités exercées par les forces d’intervention sionistes notamment à Jérusalem[22]. Le futur premier ministre Menahem Begin à la tête de l’Irgoun Zvaï, organisation armée sioniste en Palestine, se vanta plus tard du fait que les sionistes avaient amenés le terrorisme non pas seulement au Proche-Orient mais dans le monde entier[23]. Le rabbin orthodoxe Baruch Korff déploya des réseaux de financement clandestins, afin de soutenir des actions d’influence (couplées à leur propagande) à l’intérieur de l’empire britannique alors plutôt enclin à courtiser les Arabes suivant la nouvelle donne géopolitique de la Guerre froide[24].

Après la Deuxième Guerre mondiale, le directeur du Bureau pour les affaires du Proche-Orient au département d’Etat des Etats-Unis, Loy Henderson, répéta qu’un soutien de la part de Washington au sionisme leur ferait perdre toute crédibilité morale : « En ce moment les Etats-Unis ont acquis un prestige moral au Proche et au Moyen-Orient, qui n’est égalé par aucune autre des grandes puissances. Nous perdrions (alors) ce prestige (en cas de soutien aux sionistes) et ce pour de nombreuses années, car nous serions considérés comme des traîtres des hauts principes que nous avons nous-mêmes proclamés durant la Seconde Guerre mondiale. »[25] Henderson était l’une des voix mettant en garde contre le « plan de partition » de la Palestine qui ferait selon lui de la « question de Palestine » un « problème permanent » pour le futur des relations internationales[26]. Le directeur du bureau du département d’Etat pour le Proche-Orient, Gordon P. Merriam rappelait de son côté que toute partition devait reposer sur le consentement des populations concernées sans quoi les principaux traités de droits, de la Charte de l’Atlantique à la Charte de l’ONU, seraient clairement violés[27].

Au printemps 1948, dans une ébauche de mémorandum interne estampillé « Secret », Dean Rusk, travaillant pour le bureau des Nations Unies au sein du département d’Etat confiait au sous-secrétaire Robert A. Lovett : « Les Juifs seront les agresseurs des Arabes. Cependant, les Juifs prétendront qu’ils ne font que défendre les frontières de leur état selon le tracé de l’ONU (…) Dans le cas d’une aide apportée aux Arabes, les Juifs courront auprès du Conseil de Sécurité (de l’ONU) en clamant que leur état fait l’objet d’une agression armée et ils utiliseront tous les moyens afin d’obscurcir le fait que c’est leur propre agression armée contre les Arabes qui est porteuse de la cause de la contre-attaque arabe. »[28]

En dépit des avancées de la « nouvelle histoire israélienne »[29], l’historiographie officielle continue de minimiser, quand elle ne le tait pas, l’emploi de la violence de la part des milices sionistes contre les populations palestiniennes. Pourtant, selon l’historien israélien Tom Segev : « Israël est née de la terreur, de la guerre et de la révolution, et sa création a requis un degré certain de fanatisme et de cruauté. »[30] Un fait qui est illustré lors de la prise illégale de Jérusalem à l’issue de la guerre de juin 1967 par le ministre de la défense Moshe Dayan[31]. Le premier ministre Levy Eshkoll n’eut pas alors les moyens, ni les ressources, qui lui auraient permis de contrôler l’avancée militaire. Zeev Schiff, ancien correspondant militaire pour le quotidien israélien Haaretz, a révélé des années plus tard la teneur d’une conversation qu’il avait eue à l’époque avec le général Ariel Sharon[32]. Celui-dernier se félicitait: « En des moments comme celui-ci en particulier, après la victoire[33], il est souhaitable qu’Israël ait un premier ministre faible (face à l’armée), ce qui rend possible le transfert rapide des forces armées israéliennes et des camps d’entrainement à travers les territoires de la Cisjordanie. »[34]

Depuis l’annexion israélienne de Jérusalem en 1967, la question de la souveraineté sur le « Mont du temple » (Haram al Sharif – « noble sanctuaire » pour les arabes) a pris une importance symbolique. Haut lieu sur lequel les Omeyyades ont bâti leur Mosquée al-Aqsa au début du 8ème siècles il est situé sur les fondations du présumé temple de Salomon, lieu du premier royaume d’Israël[35], instauré, selon la chronologie biblique, au Ier millénaire av. J.-C., mais pour lequel les traces archéologiques restent peu probantes[36].  La victoire de 1967 avait conduit à la destruction du quartier des Maghrébins à Jérusalem-Est ainsi que des villages environnants, déplaçant les populations locales hors de ces zones stratégiques pour le contrôle de cité sainte[37].

La légitimation de cette violence, par l’emploi de canaux clandestins, signale autant l’incapacité des courants démocrates israéliens, à faire appliquer les engagements diplomatiques internationaux, selon une approche politique modérée, que l’affirmation grandissante depuis cette époque du rôle de la droite radicale et de l’armée qui a pris en main le destin et la sécurité d’Israël[38]. Cette même droite radicale a clamé sans relâche depuis 1967 que le maintien de l’autorité du Waqf, la plus haute instance arabe en charge de l’administration de Mont du temple, siège de la mosquée Al-Aqsa, désacralise le « temple des juifs », promettant sa reconstruction future en lieu et place de la mosquée[39].

Suite à une phase de négociations menées à Camp David (USA), en septembre 1978, sous l’égide de la présidence J. Carter, un deuxième volet de discussion s’était tenu en juillet 2000. Le président William J. Clinton (Bill Clinton) avait alors pu tester la résolution palestinienne sur la souveraineté de Jérusalem-Est. Lors des discussions, Yasser Arafat avait déclaré à Clinton : «Je préfère mourir plutôt que de reconnaître la souveraineté d’Israël sur Haram al-Sharif…Je ne veux pas rester dans les mémoires arabes comme un traitre à leur cause. »[40]. Quelques jours plus tard, faisant face  aux reproches de Clinton, aligné politiquement sur le premier ministre israélien Ehud Barak, le chef de la négociation palestinien Saeb Erekat,  laissait percer son exaspération à propos des 22% des territoires historiques restant en Palestine, en Cisjordanie et à Gaza sur lesquels les Palestiniens étaient sensés fonder leur Etat: « Maintenant vous (Clinton) dites que Arafat n’a pas fait les concessions nécessaires…Il a accepté ces 22% (de territoires) restant parce que les administrations américaines précédentes et l’Europe avec elles ont dit qu’ils soutiendraient ceux qui œuvrent pour la paix. Bien, c’est exactement ce que nous attendons de vous, Mr. Le Président (Clinton). »[41]

Quelques semaines plus tard, le 28 septembre, la visite d’Ariel Sharon sur l’esplanade des Mosquées marquait le début de l’embrasement. Selon l’historien Patrick Tyler, l’acte de défi symbolique d’Ariel Sharon lui permettait de réaffirmer la prétention d’Israël sur les lieux saints[42].

Le statut de Jérusalem-Est reste, aujourd’hui comme hier, l’enjeu central du conflit Israélo-arabe, focalisant les attentes, en apparence irréconciliables, des deux bords[43]. Qui ose prétendre, comme l’ont fait D. Trump et B. Netanyahou, que le déplacement de la capitale de l’Etat d’Israël participera à l’entente et la paix dans la région ?

 Le parti du Likoud de Netanyahou, flirtant avec les franges politiques les plus radicales, a laissé faire l’annexion des territoires de Cisjordanie par les colons juifs, niant les droits fondamentaux à toute une population de « non-citoyens » placés sous un régime d’occupation militaire. Une élite militaire, paraît ainsi avoir pris le contrôle de la politique israélienne en dictant ses options, son calendrier sécuritaire et « antiterroriste », qui marginalise la voix des libéraux[44]. Selon l’historien Patrick Tyler, c’est la peur, l’instabilité et le terrorisme qui sont l’adrénaline de la droite israélienne qui s’en nourrit pour se maintenir au pouvoir[45].

Voilà une décennie, les Prof. John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, ont appelé à déconstruire les mythes du passé, afin de permettre à un plus large public d’accéder à une histoire dépassionnée de la fondation de l’Etat d’Israël[46]. Faisant écho aux historiens de la « nouvelle histoire », cet appel traduit l’espoir que les actions politiques ne soient plus influencées par les stéréotypes identitaires et autres prétendus droits bibliques immémoriaux[47]. Dans la réalité le contraire s’est produit : les dirigeants israéliens ont exploité la carte du mythe de la « cité éternelle » et « indivisible ». Ils n’ont eu de cesse de s’approvisionner aux sources du récit identitaire sioniste, niant la nature plurielle et composite de Jérusalem[48]. La finalité étant d’empêcher l’autodétermination des palestiniens par l’imposition de la loi de la minorité ethnique juive contre la majorité[49]. L’expulsion systématique des familles palestiniennes de leur maison et les conditions d’occupation des terres palestiniennes se sont aggravées. Un démenti à ceux qui croyaient qu’Israël parviendrait à s’affirmer en tant que modèle démocratique et non en tant qu’Etat d’apartheid[50].

Loin de reconnaître la validité des traités et des engagements internationaux, le président états-unien Donald Trump et son allié israélien B. Netanyahu, ont pris le parti de s’en affranchir[51]. Les travaux de l’historien Rashid Khalidi ont démontré que les Etats-Unis, n’ont jamais été les médiateurs impartiaux qu’ils prétendaient être dans ce conflit[52].

Selon Ari Shavit, correspondant au quotidien Haaretz, le jour anniversaire de l’indépendance d’Israël, le 14 mai 2013 : « Les Américains, les Européens, les Arabes et les Israéliens sont maintenant exposés – qu’ils en aient conscience ou non – à l’énorme fossé existant entre la dimension (humaine) de l’injustice israélienne et l’intensité (inhumaine) de la brutalité qui l’environne. Ce fossé a ouvert les yeux des individus en expliquant certaines choses que nous avions à faire en tenant compte de l’immense accomplissement auquel nous sommes arrivés. Cela a rendu le post-sionisme dépassé, expliquant le sentiment de fierté que nous sommes en droit de ressentir en ce jour de notre indépendance, en définissant les défis qui nous attendent, en notre 66ème année d’existence. »[53]  Si Israël a tant accompli, comme le dit justement A. Shavit, elle doit maintenant pérenniser son œuvre en envisageant comment remplir ses obligations d’Etat démocratique, en respectant ce même droit international sur lequel repose son existence.


 

[1] Selon la Jerusalem Embassy Act (1995).

[2] En tant que moteur de la création du foyer national juif en Palestine dès la fin du 19ème siècle, le sionisme a entretenu ce mythe de l’indivisibilité de la cité sainte afin d’en tirer profit. Lire Ilan Pappe, The Idea of Israël, a history of Power and Knowledge, New York, Verso, 2016.

[3] Traduction de l’historien Ilan Pappe : « Zionism was driven by a wish to rewrite the history of Palestine, and that of the Jewish people, in a way that proved scientifically the Jewish claim to « the Land of Israël », in ibid., p.18. Dans la version sioniste de l’histoire, avant 1882, les terres de la Palestine étaient présentées comme « inoccupées ».

[4] Dès le début des années 1970, un courant de « nouveaux historiens » israéliens a choisi de prendre le contre-pieds de l’histoire officielle en s’inscrivant dans un courant de pensée post-sioniste. Il s’agit d’un noyau initial formé de Sima Flapan, Benny Morris, Tom Segev, Ilan Pappe, Avi Shlaïm. Qui entraînera une nouvelle vague à leur suite : Baruch Kimmerling, Idith Zertal, Shlomo Sand et Uri Ram. Ces derniers ne sont pas tous d’accord notamment sur l’interprétation des violences et des effets de celles-ci.

[5] Lire le compte rendu de l’ancien ambassadeur de France Roger Garreau, « Le statut international de Jérusalem » in Le Monde diplomatique, mai 1955, p.1 et 3.

[6] On rappellera que l’ONU, l’Union européenne et la pape ont tous condamnés l’annonce faite par le président D. Trump. Lire Jason Horowitz, « U.N., European Union and Pope Criticize Trump’s Jerusalem Announcement » in The New York Times, 06.12.2017. Sur : https://www.nytimes.com/2017/12/06/world/europe/trump-jerusalem-pope.html

[7] Lire entre autre le compte rendu de William Yale, The Near East : A Modern History, Ann Arbor, University of Michigan Press, 1968, pp.266-270. Dans lequel celui-ci écrit : « The Zionists in England well understood that British leaders would have to be approached on the basis of their interests and ideas. (…) The means used were adapted admirably to the personal outlook and characteristics of the men to be influenced. »

[8] Ibid.

[9] La version finale de la déclaration Balfour avait été rédigée par Leopold Amery, un fervent sioniste. L’idée étant elle-même attribuée à un membre fondateur des Parushim Horace Klein.

[10] Alison Weir, Against our better Judgment, How the U.S. was used to create Israël, 2014, pp. 8-9

[11] Reinharz, Jehuda, « His Majesty’s Zionist Emissary : Chaim Weizmann’s Mission to Gibraltar in 1917. » in Journal of Contemporary History, no 27, vol 2, 1992, p. 263

[12] Il l’est depuis 1914 grâce à une bourse du financier Jacob Schiff.

[13] Allen Murphy, The Brandeis-Frankfurtr Connection : The secret Political activities of Two Supreme Court Justices,

[14] Les résultat de la prof. Schmidt furent publié en 1978 dans American Jewish Historical Quarterly. Cité par Alison Weir, op. cit. p. 11.

[15] Mulhall John W., America and the Founding of Israël : an Investigation of the Morality of America’s Role, Los Angeles, Deshon, 1995, p.79 cité par Alison Weir, op.cit., p.25

[16] Norman E. Saul, The Life and Times of Charles R. Crane, 1858-1939 : American Businessman, Philanthropist, and a Founder of Russian Studies in America, Lanham – MD, Lexington Books, 2012, p.196.

[17] Voir en outre le témoignage de l’ancien agent de la CIA Wilbur Crane Eveland dans Wilbur Eveland, Ropes of Sand : America’s Failure in the Middle East, London, W.W. Norton, 1980, p.48.

[18] La nouvelle école historique israélienne, post-sioniste, dont Yehouda Shenhav, a beaucoup travaillé sur les archives déclassifiées de cette période en montrant le caractère manipulatoire de telles opérations. Voir Ilan Pape, op. cit. pp.179-196.

[19] L’assassinat fut commandité par le LEHI sous la direction du futur premier ministre Yitzhak Shamir, le 17 septembre 1948. Voir le compte rendu sur la Jewish Virtual Library, http://www.jewishvirtuallibrary.org/the-assassination-of-count-bernadotte

[20] Dans ses mémoires, le président Truman relèvera le poids de ces pressions sionistes aux Etats-Unis : « I do not think I ever had as much pressure and propaganda aimed at the White House as I had in this instance. » cité par Michael T. Benson, Harry S. Truman and the Founding of Israël, Westport CT, Greenwood, 1997, p.106

[21] Lilienthal, Alfred M., What Price Israël ? 50th Anniversary ed., Haverford, PA : Infinity Publishing, 2004., p.63

[22] On a retrouvé les archives du LEHI, notamment pour le massacre des habitants du village de Deir Yassin. Celles-ci font état de l’emploi de la terreur et d’extermination d’enfants alignés le long de murs et mitraillés. Lire l’article de Ofer Aderet, publié dans Haaretz, le 16 juillet 2017, traduit en français sur le site de l’Union Juive française pour la paix, UJFP : http://www.ujfp.org/spip.php?article5800

[23] Russell Warren Howe, « Fighting the Soldiers of Occupation from WWII to the Intifada » in Seeing Light : Personal Encounters with the Middle East and Islam, Ed., Richard H. Curtiss and Janet McMahon, Washington D.D., American Educational Trust, 1997, pp.38-39.

[24] En 1948, Baruch Korff publia un encart dans le New York Post qualifiant la politique du Département d’Etat U.S. contre le plan de partition : « pure and simple anti-Semitism…plain everyday anti-Semitism, incorporated in the hearts and minds of those who govern free America » in Stevens Richard P., American Zionism and U.S. Foreign Policy, 1942-1947, Reprinted by the Institute for Palestine Studies, 1970, New York, Pageant, 1962.

[25] Neff Donald, Fallen Pillars : U.S. Policy towards Palestine and Israël since 1945, Washington D.C., Reprint Edition, Institute for Palestine Studies, 2002, pp.30-31

[26] Le secrétaire d’Etat de Truman, Dean Acheson était également opposé au sionisme. Selon son biographe celui-ci était inquiet du prix que l’Occident finirait par payer pour Israël.

[27] In Neff Donald, op. cit. pp.42-43. George F. Kennan, directeur du Policy Planning Staff aud département d’Etat émettait un document Top Secret le 19 janvier 1947 qui soulignait les retombées négatives pour les Etats-Unis du plan de partage de l’ONU.

[28] Draft Memorandum by the Diector of the Office of the United Nations Affairs, Dean Rusk, to the Under Secretary of State, Robert A. Lovett, Secret, Washington, 4 mai, 1948, FRUS, 1948, pp.894-895.

[29] Ces recherches ont servi à documenter le présent article. Voir note supra no 4.

[30] Segev Tom, The Seventh Million, New York, Hill and Wang, 1993, p.63. cité dans Alison Weir, op. cit. p.58

[31] Dix jours après la fin des opérations, le général Dayan déclara au caveau des Patriarches à Hébron : « Nous sommes venus ici (Jérusalem) pour l’éternité ». Lire la discussion à ce sujet

[32] Ariel Sharon sera ministre de la Défense de 1981 à 1983, ministre des Affaires étrangères de 1998 à 1999 puis Premier ministre d’Israël de 2001 à 2006.

[33] La principale bataille finale fut celle de Latroun le 5 juin 1967

[34] Johnathan Cook, Israel and the Clash of Civilisations, London, Pluto Press, 2008, p.105

[35] Selon la Bible : « Chaque jour de la vie de Salomon, Juda et Israël sont demeurés en sécurité, chacun sous sa vigne et son figuier, de Dân à Beer-Sheva » in Livre des Rois, 1, 5, 4-5.

[36] On rappellera l’argumentation de Shlomo Sand, bien que controversée à ce sujet. Celui-ci écrit : « Il n’existe (en fait) aucun vestige de l’existence de ce roi (Salomon) légendaire dont la Bible décrit la richesse en des termes qui en font presque l’équivalent des puissants rois de Babylone ou de Perse. » in Shlomo Sand, Comment fut inventé le peuple juif , Paris, Fayard, 2008, p. 235 puis plus loin : « Des auteurs et des rédacteurs divers du monde antique cherchèrent à créer une communauté religieuse cristallisée et puisèrent dans la politique du passé «glorifié» pour contribuer construction d'un avenir stable et durable pour un centre de culte important à Jérusalem. Leur souci principal était de se différencier des habitants païens, et ils inventèrent donc la catégorie d'«Israël» comme peuple sacré et élu d'origine étrangère, face à Canaan, vu comme l’antipeuple local de puisatiers et de bûcherons. » in ibid. p.241-244

[37] L’entretien de Tom Segev dans « Les cicatrices de la guerre des Six-jours » in Le Monde, 21.05.2008. (des propos recueillis par Sylvain Cypel). Immédiatement après la guerre, Yitzhak Rabin ordonna de raser les villages de Imwas, Yalou et Bayt Nouba en expulsant quelque 1500 habitants.

[38] Ceci d’autant plus que la guerre de 1967 et la prise de Jérusalem plaçait Israël au ban de la communauté internationale, plusieurs fois condamné à rétrocéder les « territoires occupés ». Des résolutions réitérées depuis lors et jusqu’à nos jours. Le journal Foreign Policy établissait la liste des résolutions du Conseil de Sécurité violées par Israël dans un article de Jeremy R. Hammond, « Rogue State : Israeli violations of U.N. Security Council resolutions » in Foreign Policy Journal, January 2010, sur : https://www.foreignpolicyjournal.com/2010/01/27/rogue-state-israeli-violations-of-u-n-security-council-resolutions/

[39] Lire le chapitre 8 « Beyond Routine Politics : The Cultural Radicals and the struggle for the Temple Mount » in Ehud Sprinzak, The Ascendance of Israel’s Rical Right, New York, Oxford University Press, 1991, pp.251-288.

[40] Echange rapporté dans Patrick Tyler, A World of Trouble, The White House and the Middle East, New York, Farrar, 2009, p.505

[41] Ibid.

[42] Ibid., p.508

[43] Ce que le droit et l’ONU semblait devoir garantir.

[44] C’est la thèse de Patrick Tyler, Fortress Israel, The inside story of the military Elite who run the country, New York, Farrar, 2012.

[45] Dans Patrick Tyler, op. cit. p.508

[46] Cette remarque intervient à la fin de leur ouvrage sur les lobby israéliens aux Etats-Unis, dans le chapitre intitulé : « Encourager un débat plus libre », lire : John J. Mearsheimer et Stephen M. Walt, Le Lobby pro-israélien et la politique étrangère américaine, Paris, La Découverte, 2007. P.383.

[47] Voir à ce sujet l’historien israélien Ilan Pappe, The Idea of Israël, op. cit. Edward Saïd a contribué à renouveler notre compréhension de la relation dialectique existant entre le pouvoir et les élites académiques. Renouvelant le questionnement sur le sionisme du point de vue des victimes.

[48] Ibid. pp.509-510

[49] Voir Thomas Suarez, State of Terror, How terrorism created modern Israel, Bloxham, U.K., Skyscraper, 2016, p.10.

[50] Lire Raphael Mergui et Philippe Simonot, Israel’s Ayatollah, Meir Kahane and the far right in Israël, London, Saqi Books, 1987 (traduit du français : Meir Kahane : le rabin qui fait peur aux juifs, 1985). Voir le documentaire de Ana Nogueira et Eron Davidson, The Roadmap to Apartheid, 2012, référence : http://roadmaptoapartheid.org/

[51] Quelle application de la Convention de Vienne sur le droit des traités du 23 mai 1969, voir notamment l’étude du Prof. Eric David, « Le statut étatique de la Palestine », 2012, sur http://cdi.ulb.ac.be/wp-content/uploads/2012/12/6.-Statut-e%CC%81tatique-Palestine.pdf 

[52] L’historien Rashid Khalidi a depuis montré comment les Etats-Unis, loin de servir d’intermédiaire impartial avaient contribué à défaire la paix. Rashid Khalidi, Brokers of Deceit : How the U.S. has undermined Peace in the Middle East, Boston, Beacon Press, 2013.

[53] Ari Shavit, senior correspondent, Haaretz, on Israel’s Independance Day, 2013.

Contrairement à ce que pensent nos experts, ce ne sera pas une nouvelle guerre froide. Pourquoi ? La nouvelle guerre n’est plus une bataille d’idéologies, un combat philosophique, une lutte d’idéaux mais une bataille entre une superpuissance déclinante, ses alliés et des pays en pleine renaissance comme la Russie et la Chine.

Dans la dernière semaine de mars, des dizaines de diplomates russes ont été désignés comme persona non grata dans plusieurs capitales européennes. Alors que la tension augmentait entre les États-Unis et la Russie, le Secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres, avait déclaré qu’il était temps de relancer les canaux de communication de la guerre froide du siècle dernier. « Ces mécanismes sont démantelés. Il est temps de les raviver à nouveau » , avait-il souligné publiquement, avertissant que sinon, il y avait un danger que les choses puissent échapper à tout contrôle.

Un autre signal fort d’une guerre froide muée en guerre chaude fut la Nuclear Posture Review de l’administration Donald Trump, publiée en février de cette année. Le document révélait à la presse un plan pour augmenter l’arsenal nucléaire américain et justifiait à l’avance une utilisation plus permissive des armes nucléaires. Cette déclaration a été suivie par le discours du Président  Poutine sur l’État de l’Union, prononcé le 1er mars, dans lequel il annonçait lui-aussi le développement de nouveaux systèmes nucléaires et de missiles capables de frapper n’importe quel coin du monde. Poutine avait surtout mis l’accent (guerre psychologique?) sur le fait que la Russie avait la capacité de percer les boucliers de défense antimissile tant vantés par les États-Unis et disposait d’armes hypersoniques alors qu’en 2016, les États-Unis avaient installé un système antimissile de 800 millions de dollars dans une base militaire roumaine.

En Asie, ce même mois de mars 2018, le Parti communiste chinois a levé la restriction des mandats présidentiels en vigueur depuis le début des années 1990 et le président Xi Jinping est devenu président-empereur à vie. Les États-Unis avaient pourtant tenté en novembre et décembre 2017 de construire une alliance militaire pour conserver leur hégémonie dans la région Asie-Pacifique mais ils avaient échoué. Même les Philippines ne font plus confiance à l’Oncle Sam. Moscou et Pékin ont indiqué à Washington que si désormais l’un d’entre eux venait à être attaqué par l’Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN) ou par tout autre groupe militaire parrainé par les États-Unis, les deux pays opposeront un front uni. Dès l’annonce des attaques contre la Syrie, quelques bâtiments de la marine chinoise rejoignaient la flotte russe en Méditerranée. Le ministre chinois de la Défense, Wei Fenghe, qui était à Moscou la première semaine d’avril pour assister à la 7ème conférence de Moscou sur la sécurité internationale, déclara aux médias que les deux pays avaient une « position commune » sur les question. Par ailleurs, on sait que Poutine et Xi ont convenu dans des pourparlers « secrets » de remplacer progressivement le dollar américain par un étalon-or comme monnaie de réserve pour le commerce international. La Chine a d’ailleurs déjà commencé à payer une partie de ses importations d’énergie en yuans. Les deux pays ont déjà établi des systèmes pour le commerce mondial qui contourneront à terme le dollar.

Donald Trump, un président toujours aussi imprévisible

Lors de sa campagne électorale, le candidat Trump avait donné l’impression qu’il était pour la normalisation des relations avec Moscou mais on ne s’arrache pas aussi facilement en Amérique à l’État profond et au lobby sioniste surtout lorsqu’on a fait sa carrière dans l’immobilier à New York. Du coup, depuis son élection, les relations américano-russes n’ont fait que se détériorer et l’on peut craindre qu’il n’y aura jamais de fête cette année pour la Coupe du monde de football qui devrait pourtant normalement se dérouler à Moscou. Donald Trump est  prisonnier de sa haute administration et cette dernière avait pris les devants en accélérant le déploiement des systèmes de missiles en Europe de l’Est. Face à un tel mécanisme qui n’a rien en Europe d’un mécanisme de défense, la Russie n’avait d’autre choix que de chercher des moyens de neutraliser la menace émergente.

Par ailleurs, les États-Unis n’ont pas pardonné à la Russie son intervention opportune dans le conflit syrien à l’invitation du gouvernement de Damas. Or cette intervention a sauvé la Syrie et probablement la région de la désintégration et du chaos. L’objectif des alliés était pourtant de priver la Russie du gaz et de sa base sous-marine de Tartous c’est-à-dire la priver du partage tacite de la Méditerranée entre les deux grandes puissances depuis la première guerre froide. Pour n’importe quel observateur militaire ou géopoliticien, priver Moscou des ports syriens ne peut pas être négociable. Depuis un an, tout a donc été bon pour mettre au ban de la communauté internationale la Russie : intervention présumée de celle-ci à l’élection présidentielle américaine, empoisonnement d’un agent double russe au Royaume-Uni, attaques chimiques sur la Ghouta orientale. Moscou a toujours nié avec véhémence toutes ces accusations

2014 : le grand début de la guerre chaude

Quand on refera l’histoire, on pointera du doigt l’année 2014 comme le grand début. La guerre en Syrie sera déclenchée un an après. L’Ukraine a inauguré une marque, celle de « la révolution orange » : un gouvernement démocratiquement élu à Kiev, aligné sur Moscou, fut renversé avec la participation des États-Unis et de l’Union européenne avec l’aide de militants néo-nazis ouvertement déclarés. La guerre civile a alors éclaté et les habitants de la péninsule de Crimée ont voté massivement pour revenir en Russie. En représailles, l’Occident a introduit des sanctions draconiennes contre la Russie. Là encore la France de Hollande était en première ligne.

La fin de la première guerre froide a vu l’alliance occidentale étendre son influence jusqu’aux frontières de la Russie mais les assurances données à l’Union Soviétique sur la dissolution de l’OTAN n’ont jamais été à l’époque honorées. L’expansion de l’OTAN vers l’Est a donc changé toute la donne géopolitique et brisé les rêves d’une paix européenne. En 2002, la décision américaine de se retirer du Traité sur les missiles anti balistiques (Traité ABM), traité qui était pourtant la pierre angulaire du système de sécurité international a tout fait capoter. De fait, si les États-Unis avec l’UE avaient dissous l’OTAN, poussé pour l’abolition nucléaire, et aidé à créer une nouvelle architecture de sécurité en Europe qui incluait la Russie, la première guerre froide serait morte de sa belle mort naturelle.

Ce que n’ont pas vu les Occidentaux c’est que pendant tout ce temps, la Chine progressait inexorablement vers le statut de superpuissance tandis que l’Amérique et le système financier mondial qui lui restait attaché était en déclin constant par le poids de la dette et la politique des banques centrales. Avec Xi Jinping, la Russie dispose maintenant d’un partenaire stratégique et économique fiable pour contrecarrer les machinations des faucons de guerre de Washington. De plus, les mésaventures des champs de bataille américains en Asie de l’Ouest, en Afghanistan, en Irak et en Libye ont accéléré le rythme du déclin des États-Unis et ses efforts pour provoquer une nouvelle guerre froide peuvent être considérés comme un certain chant du cygne, comme faisant partie de l’ultime tentative d’un Empire déclinant pour conserver son statut de superpuissance prééminente et d’empêcher ainsi la communauté internationale de le considérer comme rien.

Relevons que lors de la guerre froide des années 1960 et 1970, les conflits les plus intenses se sont déroulés en Asie et en Afrique

Au cours de la dernière décennie, les États-Unis ont construit tout un réseau de bases sur le continent africain. En 2007, utilisant la «guerre contre la terreur» et Boko Haram comme prétexte, Washington a mis en place le Commandement Afrique des États-Unis (AFRICOM). Nous avions analysé à l’époque cela. La montée des forces islamistes en Afrique subsaharienne ont permis aux États-Unis et à son principal allié dans la région, la France avec la force Barkhane d’étendre l’influence militaire occidentale en ajoutant plus de bases. Le dernier pays africain à avoir officiellement cédé une base militaire aux États-Unis est le Ghana. Le secrétaire américain à la Défense, James Mattis, avait annoncé à la fin de l’année dernière que le nombre de forces spéciales américaines sur le continent africain augmenterait encore en 2018. L’Afrique sera le prochain terrain de guerre de la nouvelle guerre froide. Or, la Chine est maintenant totalement occupée pour des raisons vitales (les matières premières) sur le continent africain.

Si jusqu’alors, l’objectif de Pékin a toujours été d’éviter les collisions géopolitiques et militaires avec l’Occident en mettant toujours l’accent sur le commerce et le développement, le fait que depuis 2009, la Chine a dépassé les États-Unis en tant que principal partenaire commercial de l’Afrique ne pourra pas la laisser sur la touche. Beaucoup d’États africains et c’est sans doute le cas de la République démocratique du Congo de Kabila , ont compris ce qui se passe e,t parfaitement lucides, sont désireux d’échapper coûte que coûte à l’embrasement stratégique américain.

Que ce soit donc pour protéger les projets de la route de la soie ou défendre ses intérêts en Afrique, la Chine semble comprendre ces dernières semaines qu’elle devra intervenir et elle renforce actuellement toutes ses forces de défense et la formation de ses soldats. La Chine a maintenant le deuxième plus grand budget militaire du monde, certes toujours dérisoire par rapport au budget de défense gargantuesque des États-Unis. Mais on en ignore aussi beaucoup de choses d’elle et de plus elle bénéficiera de l’expertise militaire séculaire de la Russie.

Il n’est pas du tout certain que la nouvelle guerre chaude sera encore une guerre conventionnelle. L’un de ses champs de bataille sera africain. L’autre sera-t-il Européen et de quelle Europe ?

Michel Lhomme ♦
Philosophe, politologue.

Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article